Présentation du livre (Babelio) :
L’histoire fascinante et tragique du Titanic a suscité cauchemars et rêves et a stimulé l’imaginaire de générations entières. Tragique, parce qu’elle a coûté la vie à 1500 personnes. Fascinante, parce que le Titanic représentait avec sa prétendue insubmersibilité le défi de l’homme face à la mer. Cet ouvrage foisonnant de documents retrace de façon chronologique l’histoire du paquebot du jeudi 11 avril 1912 au moment où il lève l’encre pour traverser l’Atlantique jusqu’au lundi suivant où les rescapés du naufrage sont secourus par le Carpathia. Des témoignages, des photos, des documents illustrent très largement ce bel ouvrage que l’on ouvre avec fascination et émotion.
Comme je parlais de ma série « maritime » avec un collègue, la conversation a roulé sur l’expo sur le Titanic qu’il a visitée à Paris et il m’a prêté ce livre de Philippe Masson, qui date de 1987, soit un à deux ans après qu’on ait repéré et inspecté l’épave du paquebot. Certes, beaucoup d’eau a coulé depuis (pardon pour le mauvais jeu de mots), on sait que l’épave est rongée par de minuscules animaux marins et risque bien de disparaître à tout jamais, mais ce livre constitue une bonne somme des connaissances et se base sur de nombreux documents, dont un dossier de photos parfois très émouvantes à la fin de l’ouvrage.
Six chapitres nous sont proposés : 1. Une croisière de rêve 2. L’impensable 3. Imprudence ou fatalité ? 4. Du sauvetage en mer 5. L’entrée dans la légende 6. Le mémorial maritime. Ils nous permettent de nous représenter le géant des mers, le luxe du bateau (et même des efforts de confort pour les troisième classe, qui étaient quand même les plus nombreux, la concurrence féroce qui régnait entre les armateurs de l’époque. Ils nous font vivre la tragédie du naufrage minute par minute et tentent d’expliquer pourquoi seul le Carpathia a réagi immédiatement aux appels de détresse du Titanic, ils nous plongent dans les conclusions des commissions d’enquête britannique et américaine. Ils nous font comprendre pourquoi ce naufrage est entré dans la légende (avec un goût d’échec de la société technologique, déjà à l’époque et avec les légendes qui ont couru sur le navire et sur la catastrophe). Enfin, la technologie a dû elle aussi être assez poussée pour permettre de retrouver l’épave cassée en deux.
Je crois que notre imaginaire collectif est nourri d’images, d’émotions, de représentations du naufrage. Je pense notamment au film de James Cameron, qui date de 1997, qui mêle habilement fiction et témoignages historiques (Cameron a mené de nombreuses expériences pour comprendre comment le bateau s’est comporté suite à la collision avec l’iceberg). L’intérêt du livre de Philippe Masson est de remettre les choses à plat, le plus objectivement possible, en comparant les versions dur l’origine du naufrage, et de permettre aux lecteurs de dépasser la nuit du drame en voyant notamment comment l’information a été diffusée (les fake news ne datent pas d’aujourd’hui) et comment l’enquête a été menée. Le naufrage du Titanic a donné lieu à de nombreuses oeuvres littéraires, cinématographiques, de plus ou moins bon goût. Enfin la découverte de l’épave (voir ici le témoignage de Robert Ballard) a ravivé les craintes des descendants des survivants : heureusement, la quasi impossibilité de renflouer l’épave permet à ce lieu d’Atlantique Nord de rester un mémorial pour les victimes.
« L’abordage le plus dramatique de l’histoire reste à n’en pas douter celui du paquebot britannique Empress of Ireland de 15000 tonnes. Le 24 mai 1914, le bâtiment quitte Québec à destination de Liverpool. Dans la brume du Saint-Laurent, il est abordé par le tremp norvégien Storstad. Le naufrage se produit en moins de 15 min et l’on ne compte que 264 rescapés sur 1370 septante personnes.
Chose étrange, le drame n’eut qu’un bref retentissement. Rien de comparable avec la disparition du Titanic, le seul grand bâtiment victime d’un iceberg et qui, deux ans après sa fin tragique, était déjà entré dans la légende. » (p. 163)
« Par un étrange phénomène de prise de conscience collective, le désastre du Titanic compte parmi les événements majeurs du début du 20e siècle. Contrairement à toute attente, la Première Guerre mondiale ne met pas fin à la légende. Le souvenir du prestigieux paquebot reste encore profondément ancré dans le cœur des hommes. Du fond de sa tombe le géant se trouve à l’origine d’étranges hallucinations ou d’événements bizarres. » (p. 186)
Philippe MASSON, Titanic Le dossier du naufrage, Tallandier, 1987
A voir à la Cité de la mer à Cherbourg : le sous-marin Nautile qui a participé à la découverte de l’épave et une aile de l’expo permanente consacrée au Titanic, avec une salle très émouvante faisant écouter les messages radios envoyés depuis la collision avec l’iceberg jusqu’à la fin.