Elle a conservé son ADN en puisant de nouveau dans son histoire personnelle pour tricoter un nouveau One en s’appuyant sur ses souvenirs et son vécu qu’elle éclaire avec les grands moments de ces années qui ont marqué la seconde moitié de la décennie des années 60.
Quelle fille, femme, mère devient-on quand on naît en 1965, par accident, bien trop loin de Hollywood ? Qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? Comment en sont-ils arrivés là ? Quand on émerge d’une faille spatio-temporelle, entre boomer et GenX ? Quand une éducation à l’alsacienne se confronte à l'éducation à la Dolto ?Le résultat est du Catoch’ pur jus. Tout part de sa date de naissance, en 1965, justifiant d’abord la tenue de scène, dans laquelle elle est à son aise pour barboter.
N’allez pas croire qu’elle nous raconte des trucs que les moins de cinquante ans ne vont pas comprendre. Le but est que tout le monde soit mdr comme le promet l’affiche du spectacle (Mélo-Dolto-Rétro) en s’appuyant sur ce terme d’argot Internet, principalement utilisé à l’écrit, sur les réseaux sociaux puis par SMS, pour indiquer qu’on est en train de rire, ou a minima amusé. Le ton est donné.
On rit effectivement beaucoup et souvent. Le but est atteint. Et si nous étions au paroxysme de notre rire il aurait fallu employer l’ultime niveau de langage SMS pour exprimer que nous sommes xptdr (explosés de rire pour ceux qui auraient du mal à suivre). De toute façon, ne vous inquiétez pas, Catoch’ est pédagogue. Elle explique la moindre des références sur lesquelles elle a construit la trame de ce 90 minutes de performance. Mais contrairement à celui qui était consacré à l’Alsace il n’y a pas d’examen de passage à la fin de celui-ci.Si elle est seule en scène elle ne parle pas uniquement avec le public. Elle dialogue aussi avec le technicien qui intervient en voix off et ils ne sont pas loin de former un duo, ce qui donne de la vitalité au spectacle. Parfois je m’attendais même à voir surgir des images sur le fond de scène bien que je ne sois pas très fan du procédé. Il pourrait tout à fait avoir sa place, à l’instar de la bande-son qui est très présente. L’exercice est cependant délicat car il ne faudrait pas tomber dans l’écueil du spectacle didactique.
Catherine Sandner n’a pas de souvenir direct de cette année 1965 mais, comme chacun de nous, elle en a suffisamment entendu parler pour en reprendre les évènements marquants comme les personnages illustres. En premier lieu Françoise Dolto qui aura tant fait évoluer l’éducation des jeunes enfants. Jusqu’à en faire des enfants-roi avec des parents qui n’ont pas bien intégré ses principes. Qui se retrouvent avec des Tanguy scotchés sur leurs canapé (du nom du héros de 28 ans de la comédie d’Etienne Chatilliez sortie au cinéma en 2001). Voire même carrément des tyrans, comme le fils de notre amie qui se voit traité de Khadafi …
D’ailleurs savez-vous que la tombe de Françoise Dolto (1908-1988), psychanalyste, écrivain, et de son fils Jean-Chrysostome Dolto, dit Carlos (1943-2008), chanteur se trouve à Bourg-la-Reine ? L'inscription N'aie pas peur, je suis le chemin, la vérité et la vie est gravée sur leur tombe commune que j’ai découverte en 2015.
En fine analyste des travers humains Catoch’ pointe que pour larguer quelqu’un on était alors contraint de l’annoncer en face à face et pas par un SMS expéditif. Côté drague les méthodes étaient elles aussi différentes, avec la suprématie du Minitel, une invention française révolutionnaire qui ne fut exploitée que de 1980 à 2012 et qui préfigura l’Internet d’aujourd’hui.
Sa lecture de chevet n’était pas le Journal d’Anne Frank mais d’une autre jeune fille allemande, Moi Christiane F, droguée, prostituée. Il faut reconnaître que le témoignage de Christiane Felscherinow a ébranlé la RFA à sa parution en 1970, du temps où le pays était encore divisé en deux blocs. A croire que la honte est plus efficace que la pédagogie.
Quatre ans plus tard Claude François chante Le mal-aimé et aujourd’hui les natifs de 1965 subissent de plein fouet la réforme des retraites en étant à 100% concernés. Pourquoi ? Parce que c’est comme çà aurait-on dit à l’époque. Car si les préceptes de Dolto régnaient sur les ondes et à la télévision rien n’empêchait les parents de clore le dialogue par une formule de ce type.Finalement ses principes éducatifs sont une belle arnaque nous prévient notre alsacienne préférée en pointant quel fils dévergondé elle a eu. Quoique, avec d’autres parents, il n’aurait sans doute pas été aussi heureux alors tout dépend de quel point de vue on se place. Et notre Catoch’ de conclure en nous faisant chanter le Big bisou.Le choix est encore une fois pertinent puisque, sortie en 1977, cette chanson écrite sur une musique de Joe Dassin traite de l'évolution des mœurs et de la libération sexuelle sur un ton humoristique en opposant les techniques de séduction de nos grands-parents qui « mettaient parfois jusqu'à cent ans pour s'embrasser » à la facilité d'aller beaucoup plus vite, surtout en appliquant la méthode du « big bisou ».
Au terme du voyage, Catoch' nous aura livré un message de tolérance et de compréhension mutuelle en s’appuyant sur ses expériences et sur le décryptage de quelques décennies. Un spectacle à voir à plusieurs, toutes générations confondues pour rire et en discuter ensuite.
Ce soir le spectacle était encore à l’état de show-case mais il va prochainement être programmé régulièrement. Pour la première représentation, l’humoriste avait choisi un lieu particulièrement adapté puisque c’est la plus ancienne salle d’humour parisienne. Elle n’a que 50 places mais elle abrite aussi les spécialistes les spécialistes de l’Ecole du One Man Show qui, depuis 1994, forment les meilleurs humoristes français grâce à une méthode rapide et inclusive fin de privilégier l’éclosion des talents et de la singularité, l’expérience et l’insertion professionnelle. Du coup cette école propose un cursus complet de formation professionnelle structurante et professionnalisante."1965", le nouveau spectacle de Catoch', en show-case le 18 septembre au Théâtre Le Bout6 Rue Frochot - 75009 ParisNouvelles représentations dans ce même lieu le dimanche 10 décembre à 18 h 30 et le mercredi 27 décembre à 19 h 30Il est programmé le lundi 30 octobre avec AOC au Festival Mort de Rire de WasselonneOn retrouvera les deux spectacles en alternance au festival d’Avignon 2024 (dates exceptionnelles du 29 juin au 21 juillet en raison des J.O.)