Séjournant dans un chalet isolé en pleine montagne, une femme se retrouve subitement coupée du reste du monde suite à l’apparition d’un mur invisible, au-delà duquel personne ne semble avoir survécu. Seule survivante de ce phénomène inexplicable, elle doit dorénavant tenter de subsister, accompagnée de quelques animaux domestiques…
Même s’il se retrouve labellisé « science-fiction », ce livre post-apocalyptique, datant de 1963 dans sa version originale, se rapproche plus du genre « nature writing » ou du récit de survie à la Robinson Crusoé. Le mur transparent qui constitue le point de départ du roman et dont on ne connaîtra d’ailleurs jamais l’origine, s’avère en effet plutôt symbolique et n’est finalement qu’un prétexte afin d’entamer une réflexion profonde sur la condition humaine et sur notre rapport à la nature et aux animaux.
L’héroïne, dont on n’apprendra d’ailleurs jamais le nom, doit subitement faire face à une solitude extrême au cœur d’un monde où le temps n’est dorénavant plus rythmé par des montres, mais par la nature et par les saisons. Outre les problèmes liés à sa survie, qui changent radicalement son rapport à la nature et à ses ressources vitales, elle tisse également des liens profonds avec les quelques animaux qui viennent combler ses manques affectifs.
Les amateurs d’action devront donc passer leur chemin car l’auteur autrichienne livre un roman très contemplatif au cœur d’une nature omniprésente qu’elle dépeint à merveille. La nature ne se retrouve donc pas reléguée dans un vulgaire rôle de décor, mais au centre des besoins de cette femme qui tente de survivre. En invitant à réfléchir sur notre rapport à la nature, Marlen Haushofer semble vouloir réveiller nos consciences et nous inviter à la respecter et à vivre en harmonie avec elle.
Ce journal intime marqué par l’absence de conversations et rythmé par des saisons qui se suivent et se ressemblent, aurait donc facilement pu donner naissance à quelques longueurs si ce surplus de temps n’invitait pas à continuellement réfléchir à la vacuité de nos propres existences et aux préoccupations futiles qui animent notre quotidien. Dans ce monde où l’apparence physique devient sans importance et où la consommation se retrouve réduite aux besoins les plus fondamentaux, l’essence de la vie semble vouloir remonter à la surface, loin des artifices et de la violence de notre société moderne…
Le Mur Invisible, Marlen Haushofer, Actes Sud, 352 p., 9,20€
Elles/ils en parlent également : Moka, Cannetille, Kitty, Julie, Isaure, Batuco