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Mes 7000 danses : Aventures en Indochine

Publié le 07 novembre 2021 par Franck Lalieux @FranckLalieux
Mes 7000 danses : Aventures en Indochine

J'écoutais, il y a quelques jours, l'écrivaine et poétesse Chloé Delaume parler, sur France Inter, du morceau 7000 Danses d'Indochine, mon groupe fétiche. Elle y posait des mots, évoquait des sensations et, de fait, m'a donné à comprendre ce que j'éprouvais moi-même en l'écoutant.

Le 8ème et avant-dernier morceau du 4ème album du groupe a fini par devenir l'un de mes préférés, alors même que j'étais à peine né à sa sortie (j'avais 6 mois, presque jour pour jour). Je pense qu'il résume assez bien toute la puissance, à la fois mélodique et évocatrice, d'un morceau d'Indochine.

Un voyage, peut-être aussi bien intérieur qu'inspiré par des visions de contrées sauvages, des danses chamaniques sur un fond d'apocalypse... un véritable refuge, pour reprendre les mots de Chloé Delaume.

Le titre s'offrira une cure de jouvence, presque 14 ans plus tard, dans une configuration semi-acoustique pour l'album Nuits Intimes, spectaculaire reprise avec piano, guitares folks et batterie. Les deux versions ne cesseront jamais de m'envouter.

L'oeuvre d'Indochine, depuis maintenant 40 ans et quelques semaines, prend sa source dans un rêve d'évasion, une envie profonde de s'arracher d'une réalité trop terne, trop grise, peut-être décevante. Rêves de contrées lointaines et d'aventures imaginaires, Bob Morane l'aventurier d'Henry Verne, Leïla la princesse nordique, et puis Miss Paramount et l'épouvante 50's sur celluloïd, cauchemars sur écran géant qui contaminent la plume de Nicola Sirkis.

Au fil des albums, l'onirisme engendré par le langage poétique et imagé du chanteur viendra colorer des textes aux préoccupations plus intimes, ou plus sociétales. Mais parfois c'est toujours l'évasion pure qui est le sujet d'un morceau.

Ainsi de Black Sky, sur l'album 13, qui pour moi est le pendant interstellaire de 7000 Danses. S'il s'agit bel et bien de quitter un monde pour en trouver un autre, le vide intersidéral, les étoiles et les comètes, peuvent n'être qu'un paysage mental pour un esprit tourmenté par le monde alentour qui irait chercher, les yeux fermés et l'âme envoutée, une sorte de quiétude ou une porte d'entrée à la rêverie. Et l'ampleur croissante du succès du groupe leur a permis, sur scène, d'inviter le public au même voyage, à l'aide d'un énorme écran collé au plafond des salles de concert qui transformait l'endroit en intérieur de vaisseau spatial lancé très loin vers " Jupiter and beyond the infinite ". Le sens du partage.

Mes 7000 danses : Aventures en Indochine

1.La naissance, dans le silence

Ma propre entrée en Indochine se fait, comme chez la plupart des adeptes du groupe, à l'adolescence. Et pour moi, en 2004, c'est déjà tout un territoire à explorer. Je suis lycéen, et je cherche encore mes attirances musicales.

En fait, je cherche le son qui saura m'emporter dans un ailleurs qui reste à imaginer et qui saura me faire oublier cette immense structure de verre et de béton en forme de soucoupe toute grise qu'est le lycée Durzy de Villemandeur, dans le loiret.

Collégien, je suis passé par le punk rock californien chouchou des radios et des chaînes de clips, avec une préférence pour The Offsprings, dont j'aimais surtout les mélodies que je trouvais souvent très entêtantes.

Plus tard, au lycée, je m'intéresse à des groupes qui cherchent à colorer la formation classique guitare/basse/batterie de claviers et synthétiseurs, avec un travail sur la mélodie, que j'aimerais plus hypnotique. J'écoute Radiohead, je découvre Muse en achetant leur album, Absolution, sur un coup de tête, n'ayant rien écouté d'eux mais après avoir lu une critique titre par titre dans un magazine rock de l'époque, qui décrivait le style même de morceaux que je cherchais à avoir dans les oreilles.

Je n'étais pas déçu, c'est toujours l'un de mes albums préférés, peut-être aussi par nostalgie, mais tout de même un peu plus que cela.

Mais il me manque encore quelque chose, je le sens. Juste un petit truc pour une adhésion totale. Il me manque une identification. Bien que j'aime sa voix, ses parties de guitare et de claviers, Matthew Bellamy ne me renvoie rien, je ne m'identifie pas dans ses textes, il ne devient jamais quelqu'un dont j'ai envie de découvrir les influences et les préoccupations.

Cela ne s'explique pas, c'est comme ça.

Quelques années en arrière, au moment où je découvrais le rock des Offsprings ou Sum 41, je me souviens d'un trajet en voiture jusqu'à l'Intermarché du coin dans la 205 grise de ma mère. On parlait musique, et elle me dit " puisque tu commences à écouter du rock, écoute ça, ça pourrait te plaire ". Elle sort une cassette audio qu'elle insère dans l'autoradio de la voiture et monte le son.

C'était l'album 3 d'Indochine. Ouverture, dans mon souvenir, sur 3ème Sexe. Rejet total. Dans ma tête de pré-ado, le son est beaucoup trop marqué années 80, j'ai dû employer le mot un peu bête " kitsch ". En réalité c'était bien trop loin de moi à l'époque. Un rendez-vous manqué.

Quelques années plus tard, je suis au lycée et j'écoute maintenant Muse, Radiohead et quelques autres dans ce style de rock alternatif.

Indochine avait déjà opéré son retour médiatique fracassant, et je me surprenais à fredonner J'ai demandé à la lune, comme une jolie comptine d'enfance qui revient en tête à intervalles réguliers. Mais le morceau est martelé jusqu'à l'écoeurement, revers de la médaille pour le groupe, on commence à se lasser de l'entendre dans tous les supermarchés et sur toutes les stations de radio.

Plus décisif, le clip de Mao Boy. Le morceau, cette fois, m'obsède. Ce gimmick aux violons, la guitare folk presque scintillante, les claviers et ces guitares abrasives qui entourent un refrain imparable...

La vidéo me fascine aussi, à l'époque j'aimais beaucoup toute cette vague de films d'horreur japonais avec ces filles aux longs cheveux noir corbeau, que je retrouve dans ces six petites violonistes au visage blafard et au regard inquiétant qui ouvrent le clip.

Et puis, il y a tout un réseau de symboles, signifiants ou non, qui parsèment les images et qui laissent entrevoir un univers visuel assez riche, teinté de romantisme noir.

Les robes noires, les chaînes, la croix... Derrière le groupe, des images évocatrices racontent la natalité, déjà quelques plans sur l'espace étoilé avec un bébé flottant dans une bulle, reminiscence évidente du 2001 l'Odyssée de l'Espace de Kubrick.

À ce moment là, ce clip est déjà, pour moi, une petite révélation en soi.

Mes 7000 danses : Aventures en Indochine

2.Au son des 7000 danses...,

Mais c'était une autre époque. Le téléchargement illégal était déjà bien installé, mais les faibles connexions internet que nous avions alors, qui de surcroît rendaient les lignes téléphoniques indisponibles pour le foyer, ne nous permettaient de ne télécharger de la musique que morceau par morceau. La plupart d'entre nous ne téléchargions pas d'albums entiers, trop volumineux, ça prenait des heures.

Alors je ne connaissais d'Indochine que ces singles là, J'ai demandé à la lune, Mao Boy, Marilyn (un autre marqueur pour moi, l'exemple même qu'un morceau de musique pouvait être bardé de guitares électriques, avec une batterie martiale, et être enveloppant et hypnotique) et Le Grand Secret, qui me révèle une facette plus étrange de la musique du groupe.

Et puis le hasard. Début 2004 je suis assis à une table, dans une zone du lycée dédiée aux récréations et systématiquement prise d'assaut par les joueurs de cartes Magic l'assemblée. Je suis en compagnie de l'un de mes meilleurs amis - je suis aujourd'hui le parrain de sa fille - et nous regardons cette faune un peu étrange s'adonner à leurs combats incompréhensibles pour nous.

Quelqu'un approche, un cd gravé à la main, qu'il pose sur la table face à mon ami en le remerciant pour le prêt et en qualifiant l'oeuvre gravée - illégalement - dessus de " géniale ".

Je prends le boitier, je l'ouvre et je lis l'inscription au feutre noir sur la face avant du " CD-R " : Indochine - Paradize.

Mon pote confirme tout le bien qu'il pense de l'album, et je lui demande si je peux l'emprunter quelques temps, ce qu'il accepte.

Il se trouve que ce jour là j'ai dans mon sac un baladeur Discman de chez Philips, sorte de Walkman qui lit les CD.

En cours d'anglais, je suis un peu trop bavard avec mon voisin, et très vite la prof, avec qui j'ai pourtant de bonnes relations, m'envoie terminer l'heure isolé dans le fond de la salle. Je m'ennuie un peu, et je ne résiste pas à l'envie de découvrir tout de suite cet album d'Indochine qui m'attire comme un aimant.

Je prends mes écouteurs que je camoufle dans mes manches, je laisse le Discman, imposant, dans mon sac, j'appuie sur Play et je me mets dans une position étudiée pour laisser penser à la prof que j'écoute son cours avec attention : les coudes sur la table la tête entre les mains, en fait une technique pour masquer les embouts des écouteurs plantés dans mes oreilles.

J'attends quelques secondes, le temps pour le lecteur de faire tourner le CD à bonne vitesse pour que la lentille puisse diriger le faisceau laser sur les sillons du disque, faisceau qui se réfléchit ensuite sur une cellule photoélectrique, qui convertit la lumière en un signal électrique puis numérique, pour repasser ensuite en analogique.

Voilà l'intro de Paradize.

Avec le recul, après tout ce temps, je pense encore que la suite s'est jouée sur ces quelques notes de synthétiseur. Il ne m'en fallait pas plus pour être conquis. Dans ces quelques notes, j'entrevoyais à ce moment là tout un monde, un monde passé et un monde à venir. Ces notes me rappelaient un vieux jeu vidéo que j'adorais, plus jeune encore qu'au moment de cette première session d'écoute, un jeu dont j'ai oublié le nom dans lequel on contrôlait un vaisseau spatial qui sautait de plate-forme en plate-forme.

Et l'avenir, parce qu'après cette intro, il y a cet instant suspendu de claviers en crescendo comme une épiphanie qui amène l'auditeur sur un gimmick absolument imparable, à la fois sombre et bondissant, de guitares acérées sur une batterie au son volontairement sali.

Dans les paroles, un évident rapport au sexe qui ne peut que troubler l'adolescence, sans jamais être explicite, avec suffisamment de mystère inscrit dans la langue, dans les tournures de phrase pour que l'on puisse s'imaginer une large palette d'interprétations.

Après ce morceau, Indochine ne me lâchera plus, je ne les lâcherai plus. La découverte de ce groupe a en quelques sortes influé sur mon parcours, a provoqué quelques rencontres importantes, dont celle, rapide mais inoubliable, de Nicola Sirkis lui-même.

3....un monde entier va exploser...

Indochine prend une place de plus en plus importante dans ma vie. Très vite, il me faut tout découvrir. Je récupère l'intégralité des albums en fichiers numériques gravés sur CD par l'intermédiaire d'un autre ami, et je vais de surprise en surprise.

Je suis sidéré par Dancetaria, qui, même à côté de Paradize, conserve son pouvoir hypnotique, son étrange atmosphère de contrées oubliées qui n'oublie jamais de faire chanter son public.

Quasiment dès le départ j'ai envie de voir le groupe sur scène. Problème, j'en deviens obsédé juste après la fin du Paradize Tour, et le groupe ne donne plus de concerts. Je me rabats sur le DVD du 3.6.3, leur fameux premier Bercy, qui vient juste de sortir. J'arrive à soutirer d'un autre ami la somme nécessaire, puis je file entre deux cours dans le centre ville de Montargis pour acquérir le film.

Sur l'écran de mon téléviseur, à l'étage chez mes parents, je découvre l'ambiance fiévreuse, la communion avec la foule, le charisme magnétique d'un Nicola Sirkis en robe noire qui pourrait emporter tout Bercy d'un simple regard, l'impétueux Boris à la guitare, Oli de Sat et Marc Éliard, Shoes à la batterie...

Je vis cette date historique, à quelques mois de distance, avec la frustration de celui qui sait être passé à côté d'un évènement qui ne se reproduira plus. J'avais en partie tort.

Le temps passe, je quitte le lycée le bac en poche. Je veux faire une école de cinéma, mais c'est incroyablement cher, alors il me faut enchainer les petits jobs, une année entière, pour réunir un début de somme.

Je découvre le nouveau single d'Indochine dans ma voiture, par un froid matin de novembre 2005, sur le trajet qui m'amène de mon domicile à la scierie de Chateau-Landon. Un job d'intérimaire, je suis chargé d'empiler des planches de bois sur des palettes à la sortie d'une énorme machine à découper.

Ce matin là le son explose dans les petites enceintes de ma Daewoo Lanos grise, le titre est irrésistible, dansant à souhait. Indochine lâche les guitares, et le refrain sans paroles mais aux " ouh ouh ouhouh " rassembleurs achève d'en faire un tube instantané. Alice & June, le single, annonce Alice & June l'album.

Mes 7000 danses : Aventures en Indochine
Mon single collector du titre Alice & June que je conserve précieusement.

Je m'offre l'objet collector pour noël, que j'écoute en boucle. Le son change, il correspond à une nouvelle ère pour le groupe, de nouvelles influences, d'autres envies. Le son est imposant, Nicola donne à ses textes l'allure d'un conte déglingué. Ce sera mon album fétiche.

J'assiste à mon premier concert, l'une des soirées qu'ils enchainent au théâtre Mogador, l'occasion de les voir jouer avec Aqme. Je suis avec des amis du lycée, nous sommes en fosse, l'ambiance est électrique. Nous savons où se trouve la sortie des artistes, et nous essayons au culot de nous infiltrer pour... je ne sais plus en fait... dire bonjour ? Demander un autographe ? Heureusement pour notre dignité, nous nous faisons tout de suite refouler par un agent de sécurité.

J'entre enfin à l'EICAR, l'école de cinéma que je souhaitais faire après l'obtention de mon bac. Située au sein de la Plaine St Denis, parmi les studios de télévisions et les bureaux des boîtes de production, nous sommes régulièrement sollicités pour remplir les publics des plateaux.

C'est ainsi qu'un jour, sur la porte d'entrée de l'école, nous trouvons placardée l'annonce d'une agence de recrutement de public qui souhaite remplir avec des jeunes gens une émission de prime time sur le sidaction. L'émission consiste en fait à réunir plusieurs artistes en duo pour leur faire interpréter leurs tubes, accompagnés par un orchestre symphonique. Dans la liste des artistes prévus : Indochine en duo avec l'actrice Virginie Ledoyen.

Je réponds présent, avec une amie de l'école. Ils demandent une tenue correcte exigée, alors je sors une chemise blanche, j'emprunte des chaussures trop grandes à mon père... je ne ressemble à rien.

On nous installe au tout premier rang, une place privilégiée comme on le verra par la suite.

Soudain arrive un groupe bruyant et très enthousiaste, aux tenues et maquillages pour le moins bariolés. Ils sont installés juste à côté de nous, à ma gauche.

Au départ, c'est une dame de plus d'une trentaine d'années qui est assise à côté de moi. Mon amie et moi n'avons absolument pas la tenue pour être reconnus comme " fans " d'Indochine, aussi nous ne nous parlons pas vraiment. Mais au bout de quelques minutes, cette dame à ma gauche change de place avec un homme plus âgé, cheveux courts poivre et sel, plutôt bien habillé comme le souhaitait la production mais avec un petit détail cosmétique d'importance : il porte d'invraisemblables mitaines roses.

Il engage tout de suite la conversation, il s'appelle Christian, il suit le groupe depuis les années 80.

Nous rigolons beaucoup, à nous moquer gentiment des artistes qui défilent et qui souvent répètent leur morceau un nombre incalculable de fois. Nous essayons tout de même d'être discrets, car ils jouent à 3 mètres de nous.

C'est ainsi que je verrai, pour la seule et unique fois de ma vie, le chanteur Christophe au piano qui interprète Les Mots Bleus, avec l'orchestre derrière.

Quand arrive Indochine, c'est évidemment l'excitation autour de moi. C'est la première fois que je me trouve aussi proche d'eux. Déjà, ce qui me frappe, c'est que contrairement aux autres artistes venus jouer devant nous, le groupe et en particulier Nicola nous salue. Je pense qu'ils ont reconnu leur public à ma gauche, et même si ce n'était pas le cas, il y a suffisamment de t-shirts Indochine ou de croix Paradize maquillées sur les joues pour que l'on ne se trompe pas sur l'objet de leur attention.

Virginie Ledoyen a l'air timide, je ne savais pas qu'elle chantait, en tout cas on sent bien qu'elle n'a pas vraiment l'habitude, elle est plus effacée.

Ils commencent à répéter Trois Nuits Par Semaine avec l'orchestre mais le groupe derrière Nicola fait semblant de jouer, visiblement la production a préféré mettre guitares-basse-batterie sur une bande à part pour éviter des problèmes de mixage.

Ils sont donc en playback, mais nous entendons, dans le public, leur partie disparaître et revenir, plusieurs fois. Il y a de longues minutes où il n'y a plus que l'orchestre et les deux voix, pourtant le groupe, appliqué, continue de faire semblant de jouer.

Au bout d'une ou deux tentatives, Nicola s'arrête et, tout d'un coup, se dirige vers nous. Il s'arrête devant Christian et moi (il doit bien connaître ces mitaines roses, me dirai-je plus tard). Il fait à peu près ma taille, habillé de noir et les cheveux en l'air dans une coupe très structurée. On remarque le fond de teint, indispensable sous les puissants projecteurs.

À côté de moi, mon amie est pétrifiée, elle ne s'y attendait pas. Moi, je garde mon calme, même si je n'en mène pas large. C'est devenu une sorte d'idole, même si je n'ai jamais vénéré personne et que ce n'est pas comme ça que je vois Nicola Sirkis. Disons que d'un coup j'ai trouvé comme une sorte de mentor lointain, qui m'intéresse tout d'abord par ce qu'il produit (et l'art est un puissant vecteur d'identification, même un " art mineur " comme la chanson) et ensuite par ce qu'il me transmet : des oeuvres littéraires qu'il cite en interview, qu'il emprunte dans certains morceaux, des films vus dont il s'imprègne, de la musique qu'il écoute... À chaque fois cela correspond à mes propres goûts, qui se sont construits peu à peu à son contact indirect.

Donc, oui, je m'identifie, quelque part, à Nicola Sirkis, et le voir ce jour-là, pour la première fois, juste en face de moi, s'apprêtant à nous poser une question, c'est une sorte de vertige métaphysique, pour le dire pompeusement.

En fait, ce qu'il voulait savoir, c'est si tout allait bien pour nous, et s'il n'y avait pas comme un problème sur le son. Alors Christian et moi lui expliquons que, oui, il y a un problème sur le son supposé sortir des instruments en playback du groupe. Nicola nous remercie, retourne à son micro aux côtés de Virginie Ledoyen, et explique le problème à la régie.

Une voix sortie de nulle part, comme un Dieu dans la machine, envahit le studio et lui répond que ce n'est pas grave car, lors de la diffusion, le problème sera corrigé.

Mais ça ne va pas pour Nicola, qui s'énerve légèrement et lui rétorque qu'il joue aussi pour le public en face de lui, et qu'il faut que ce soit réglé pour nous sinon il s'en va. Je suis sidéré, ce n'est pas une posture, l'homme est vraiment sincère. En discutant avec Christian, je comprends vite que cette prévenance envers son public est habituelle chez lui, il sait et le dit régulièrement que c'est grâce à lui qu'Indochine existe encore, non pas grâce aux télévisions qui a pendant longtemps rejeté son groupe. Alors il préfère crasher une grosse émission de télé plutôt que de jouer devant son public dans des conditions dégradées. Et moi, ce jour là, je comprends que j'ai vraiment choisi le bon groupe.

Le morceau enfin mis en boîte, Nicola revient encore vers nous, nous demande pour combien de temps encore nous devons rester dans le public de l'émission. Nous lui répondons " quelques heures " et lui, horrifié : " mais barrez-vous, vraiment ! ". Nous rions avant de lui dire au revoir.

L'enregistrement de l'émission se termine et, avec Christian, nous échangeons nos numéros de téléphone. Il deviendra l'un de mes amis les plus proches, j'ai rencontré sa fille puis sa femme, ils sont devenus comme une famille d'adoption, et nous avons vécus les meilleurs moments comme les plus tragiques.

Mais nos aventures en Indochine ne se sont pas terminées à la Plaine St Denis...

4.Un jour d'espoir au hasard...

À l'école de cinéma, une année se termine. Dans ce cadre, j'ai réalisé un premier court-métrage, bricolé et tourné dans une maison abandonnée de Gouvieux, dans l'Oise. Un petit film d'angoisse assez embarrassant à regarder, que j'ai laissé loin derrière moi. La seule chose qui m'amuse encore, c'est que l'actrice que j'avais choisie dans le rôle principal, qui était aussi à l'EICAR dans la section " actorat ", joue aujourd'hui un rôle secondaire mais important - une avocate - dans un feuilleton de TF1, Demain nous appartient.

Pour la deuxième année, en cours de scénario nous abordons l'adaptation d'une autre oeuvre, comment se l'approprier et la restituer dans un scripte de court ou de long-métrage. Ceci en vue de notre court-métrage de fin d'année, qui a comme contrainte d'être l'adaptation d'une nouvelle au choix.

J'avais bien sûr lu depuis un moment déjà le recueil de Nicola Sirkis, Les Mauvaises Nouvelles, et j'étais attiré par Justine, à l'heure dite qui a donné le morceau Justine, l'un de mes préférés, sur l'album Dancetaria. J'imaginais bien Nicola en lecteur du Marquis de Sade.

Je décide donc de faire de mon court-métrage de fin d'année une adaptation de Justine, à l'heure dite. La prof de scénario m'encourage, elle est plutôt contente de mon adaptation même si elle pousse à m'éloigner plus encore de la nouvelle, en me proposant par exemple de faire de l'héroïne un garçon. Mais je ne m'y résous pas, pour moi c'est par les yeux d'une fille que je dois raconter cette histoire. La seule transformation que j'opère, c'est de vieillir le personnage. Pour des raisons pratiques : je ne me voyais pas demander à une enfant de jouer ce rôle là. Alors je lui ai donné l'âge de l'amie qui devait jouer ce rôle, c'est à dire 17 ans. Ce qui évidemment enlève tout l'intérêt de la nouvelle d'origine, mais je prends ça pour un exercice.

Entre temps, nous nous exerçons aussi sur le film documentaire. Nous apprenons l'écriture spécifique de ce type d'oeuvre, et on nous demande, comme exercice noté, d'en écrire, si ce n'est un scripte entier, du moins le synopsis et la note d'intention.

Je dois toujours l'avoir dans mes archives, je l'ai pensé comme un biopic, genre prisé à Hollywood, j'étais alors bien trop influencé par le cinéma américain.

Dans ma tête le film démarre au premier Bercy d'Indochine en 2003, dans la loge de Nicola. On y découvre un chanteur stressé, à quelques minutes d'un concert vécu comme l'apogée de la renaissance médiatique d'Indochine. J'imagine un lent travelling avant sur le chanteur de dos face à son miroir, la caméra faisant progressivement le point sur son reflet, le son assourdi de la foule qui tape des mains et des pieds d'impatience (je ne sais absolument pas si l'on peut entendre le public depuis la loge, mais c'est un procédé de narration qui me plaît). Là, j'imagine une coupe franche, après avoir bien pris le temps de scruter le visage de Nicola, que l'on doit sentir perdu dans ses souvenir. Après la coupe, on récupère le chanteur toujours de dos face à un miroir, mais bien plus jeune, avant même l'existence sur scène de son groupe, dans une caserne où il doit faire son service militaire. Sur une petite tablette sous son reflet, une boîte de tranxènes. Et d'ici on déroule toute l'histoire d'Indochine jusqu'au 3 juin 2003, en terminant en apothéose.

Une structure qui n'est finalement pas très originale, mais qui m'a valu un 17/20. Le plus drôle, c'est que bien des années plus tard je découvre au cinéma le film Bohemian Rhapsody, l'horrible biopic du groupe Queen, qui utilise le même procédé d'écriture. C'est dire si c'est innovant...

Si je devais y réfléchir aujourd'hui, j'essaierai un collage d'archives et d'oeuvres satellites, celles qui ont influencé les morceaux du groupe, dans un film non linéaire qui parcourrait les souvenirs de Nicola, circonscrits à son état d'esprit actuel. Ce serait bien plus fort, mais je sais qu'il y a déjà une jeune femme très talentueuse qui travaille sur un film documentaire sur le groupe.

L'écriture du court-métrage adapté de Justine achevée, il me faut trouver des acteurs et une équipe technique. J'imagine plus tard, si tout va bien, passer le film dans des festivals, aussi je veux me couvrir. Je veux demander à Nicola son accord pour utiliser non seulement sa nouvelle, mais aussi le morceau comme bande-son. Je lui envoie un message via Myspace, abandonné aujourd'hui mais qui à l'époque était le moyen privilégié pour le contacter. Il répond quelques temps plus tard, une réponse très courte pour me dire qu'il est d'accord pour tout.

Les mois passent, je travaille encore un peu le scripte, j'obtiens l'accord de mon amie pour incarner le rôle de Justine, et je cherche toujours celui de l'homme avec qui elle converse au téléphone. Je pense à Christian, qui est partant mais qui me donne une autre idée.

" -Pourquoi tu ne demanderais pas à Nicola de jouer ce rôle ? "

Silence. Ça me paraît totalement absurde sur le coup, puis je réfléchis quelques minutes. Et tout d'un coup ça me paraît être la meilleure chose à faire. Il me faut quelqu'un d'immédiatement charismatique à l'écran, car le jeu ne doit pas être forcé. Nicola Sirkis n'est peut-être pas un acteur, mais il apparait dans la plupart des clips d'Indochine, il sait jouer avec son image, pour moi ça suffit.

" -Ok, mais je ne veux pas lui demander par mail ou par Myspace. Pour tenter de le convaincre, je veux le rencontrer. Comment on fait ? "

Évidemment, j'ai promis à Christian une place sur mon tournage, si jamais l'idée se concrétisait. Alors nous nous embarquons dans une improbable " traque au chanteur ", comme je l'appelle maintenant.

Où le trouver ? Indochine est en pause depuis la fin de la tournée Alice & June Tour. Nous savons que le groupe travaille sur un prochain album. C'est un peu confus dans ma mémoire, mais il me semble que le premier Stade de France du groupe a déjà été annoncé.

Nous commençons par Versailles. Une source anonyme - vraiment je ne sais pas qui est son contact - a donné l'adresse du chanteur à Christian. Il m'y amène avec sa voiture. Nous nous garons dans une rue bordée de hautes et belles maisons, serrées les unes aux autres.

Et tout d'un coup, j'ai honte. Qu'est ce qu'il nous prend ? Allons-nous vraiment pénétrer dans l'intimité du chanteur, dans l'endroit où il peut revêtir un semblant d'anonymat pour y retrouver sa vie privée ?

Je ne peux pas descendre, je préfère rester dans la voiture pendant que Christian, qui n'a honte de rien et qui y va au culot, va sonner au portail. Il attend quelques minutes pendant que mon coeur bat à tout rompre, certain qu'il va se faire jeter, ce qui serait légitime.

À mon grand soulagement, personne ne répond. La maison semble vide. Nicola étant un homme très occupé, il y avait peu de chances que l'on tombe sur lui en journée.

Nous repartons, cherchant d'autres idées. Christian, qui sait tout ou presque, connait un autre endroit où l'on pourrait avoir plus de chances.

Quelques jours plus tard, nous circulons dans Paris, de nouveau dans la voiture de Christian. Nous avons trouvé une adresse, dans les crédits du site officiel. Christian sait qu'Indochine possède un bureau et un petit studio quelque part dans le 13ème arrondissement, sans savoir exactement où. Il m'a fallu quelques instants de navigation sur Indo.fr pour trouver. L'adresse était là, à disposition du monde entier, il suffisait juste de faire le lien.

Dans la voiture, Christian m'apprend qu'il croit à certains signes qui annoncent certains évènements dans l'existence. Moi je fais la moue, sceptique. Je ne crois pas aux signes, mais plutôt aux coïncidences.

Christian insiste et m'annonce :

" -Si nous entendons L'Aventurier avant d'arriver, ça veut dire que l'on va rencontrer Nicola ! "

Je m'esclaffe, mais je me mets soudain à attendre le prochain morceau de la playlist de la chaîne RTL2, sur laquelle l'autoradio est réglé, avec une certaine fébrilité.

Deux ou trois morceaux - et déceptions - plus tard, quelques notes familières égrenées au synthétiseur se diffusent par les enceintes de la voiture. Je regarde Christian, qui sourit de toutes ses dents.

" -Ouais bon, on va voir si ça marche ton truc, il est très occupé, on risque encore de le rater . "

Était-ce une fanfaronnade de sa part, ou bien y croyait-il vraiment dur comme fer ? Aujourd'hui encore je n'en suis pas certain. Toujours est-il que la suite lui donna raison.

Nous arrivons donc dans cette petite rue du 13ème arrondissement, plutôt calme et entourée d'immeubles de trois ou quatre étages. Le local investi par l'équipe d'Indochine est reconnaissable par sa devanture vide et neutre, qui ne laisse pas entrevoir l'intérieur. À la porte, une sonnette indique " KMS ", nous sommes au bon endroit.

Encore une fois, c'est Christian qui sonne, je n'assume décidément pas la démarche, je crains de déranger des gens en plein travail et qui n'ont absolument pas le temps de s'occuper d'un étudiant.

Quelqu'un ouvre, ce n'est pas Nicola. Il s'appelle Alain, il est grand, il doit approcher de la cinquantaine mais avec cette énergie de la jeunesse que confère la pratique assidue du rock'n roll (quand il ne faisait pas le secrétaire particulier d'Indochine - il ne l'est plus depuis un moment maintenant -, il montait sur scène avec son groupe Les Vierges).

Derrière ses grosses lunettes, il nous observe. Il reconnait Christian, sourit et entame la discussion. On parle de tout et de rien, du travail mais sans donner trop d'informations sur ce que fait Indochine.

Puis Christian lui demande, de but en blanc :

" -On peut voir Nicola ? "

Évidemment, la seule réponse possible, dans cet endroit dédié au travail et aux affaires courantes, loin des bains de foule et de toute promotion, ne se fait pas attendre :

" -Non, on ne peut pas voir Nicola. C'est un lieu de travail ici, on ne vient pas prendre des photos ou signer des autographes. "

C'est un malentendu, mais il faut dire que Christian a posé directement la question sans contextualiser la démarche. Alors nous lui expliquons. Alain se détend, soulagé de ne pas avoir à gérer des fans un peu trop entreprenants (même si nous le sommes, par la force des choses) et nous répond que, dans ce cas, on pourra peut-être lui parler s'il arrive à l'heure. En effet, il doit arriver d'un moment à l'autre au bureau, pour repartir un peu après pour une réunion de préparation concernant le concert au Stade de France, avec Sony.

Nous attendons à l'extérieur, guettant chaque voiture qui tourne dans la rue, moi complètement paniqué en pensant à la manière dont je vais aborder Nicola.

Enfin, une Chrysler Voyager noire tourne et passe devant nous. À l'intérieur, sous des lunettes de soleil, un visage qu'il nous est impossible de ne pas reconnaître.

Christian exulte :

" -Je te l'avais dit, on a entendu L'Aventurier à la radio ".

La panique redouble, pendant que Nicola réussit un créneau dans un endroit qui me paraissait trop étroit pour parquer une grosse Chrysler.

Il descend, et à ce moment là je me pose une question absolument essentielle : dois-je le tutoyer ou le vouvoyer ?

Je n'arrive pas à résoudre le problème. C'est un individu que je ne connais pas, que je rencontre réellement pour la première fois, dans un cadre que moi-même je veux " professionnel ". D'un autre côté, j'écoute sa voix chanter des paroles qui me correspondent depuis mon adolescence, qui semblent dessiner les contours d'une personnalité faite de ce que moi je projette et de ce qu'il est réellement.

J'en suis encore à me débattre avec ces considérations quand Nicola Sirkis arrive vers nous. Ses cheveux ne sont pas teints, comme on a l'habitude de le voir, quelques mèches blanches apparaissent de ci de là, parmi d'autres plus foncées. Il a une barbe poivre et sel de plusieurs jours, porte un baggy et de grosses chaussures de skateur. Mais ça ne dégrade en rien son image, il parait toujours plus jeune que son âge.

Il reconnait Christian et lui adresse un grand sourire, assorti d'un " salut ça va ? " qui me rassure. Quelle que soit sa réponse, ça va bien se passer.

Christian me présente, et c'est à moi de m'expliquer. La question irrésolue du pronom à utiliser pour m'adresser à lui trouve sa solution bien malgré moi : le " tu " m'échappe sans que je n'y fasse attention, et c'est sur ce mode là que je continue de m'adresser à lui pendant les quelques minutes suivantes, sans qu'il n'ait eu l'air de s'en formaliser.

Je lui parle du projet Justine, il se souvient de ma demande via Myspace et me dit qu'il a déjà donné son accord.

Je lui réponds que j'ai en fait une autre demande concernant le film. Je lui lance ça d'un coup : " j'aimerais que tu joues le rôle de l'interlocuteur de Justine ".

Il sourit, et m'adresse une remarque dont je me souviendrais longtemps : " mais... je suis pas acteur ! "

" -Je sais, mais ce n'est pas grave, tu peux tenir le rôle car tu es très charismatique "

Il me répond du tac au tac, avec humour, comme une blague :

" -Oui, il paraît... "

L'ambiance est détendue, on rit de cet échange, et il nous invite à entrer quelques instants dans la première pièce qui sert d'accueil.

À l'intérieur, un petit canapé et une table basse. Mes souvenirs se sont estompés depuis, mais je me souviens très bien de la vitrine à gauche en entrant. Des disques d'or, des objets divers qui ont marqué l'histoire d'Indochine, et surtout le lézard des Tzars, figurine animée dans le clip éponyme de Marc Caro. Un trésor, en somme.

Il me demande mes coordonnées, et il veut lire le scénario. Comme je n'ai pas prévu de papier et que je n'ai pas de cartes de visite, Christian me donne l'une des siennes sur le verso de laquelle je note mon mail et mon numéro de téléphone.

Nous nous quittons avec la promesse, l'un d'envoyer rapidement le scripte, l'autre de donner une réponse le plus vite possible.

Avec le recul, je ne sais pas si Nicola Sirkis avait réellement l'intention de participer à un court-métrage d'étudiant. Cela n'a pas pu se faire, car l'EICAR impose ses propres dates aux étudiants pour les tournages, question de gestion du matériel et des équipes. Mes propres dates tombaient au mauvais moment, quand je les ai soumises à Nicola, il m'a répondu que c'était le moment où le groupe entrait en studio pour enregistrer ce qui deviendra La République des Météors.

Finalement j'ai tourné le film à l'arrache dans le loiret avec mes amis, et Christian dans le rôle que je lui destinai au départ. J'en ai un peu honte aujourd'hui, c'est très niais, pas assez profond ni assez développé. Mais c'était tout de même une belle expérience.

Et même s'il n'a jamais eu l'intention d'y participer, le fait de me recevoir, de ne pas répondre tout de suite par la négative, de demander le scripte, prouve la générosité d'un artiste capable de s'ouvrir aux autres et d'encourager les débutants. Rien que pour ça, cette entrevue m'a marqué, et je pense bien la garder en mémoire encore un bon bout de temps.

5.Le témoin que l'on assaille d'un son au loin des montagnes...

La montagne, c'est le Stade de France. Le témoin, c'est moi. Et l'oeil d'une caméra.

La période République des Météors d'Indochine s'ouvre, pour le public, en novembre 2008 avec une conférence de presse au collège des Bernardins, à Paris. Quelques fans ont gagné des invitations, mais pas moi. Christian m'encourage à venir quand même, qui sait, il y aura peut-être un désistement.

Je l'y retrouve avec ses mitaines roses, ainsi que Sofia, la dame assise à côté de moi au début de l'enregistrement de l'émission du Sidaction, que j'ai appris à connaître depuis. Plus tard je chanterai même Le Manoir à son marriage, m'accompagnant à la guitare. C'est elle qui insiste pour me faire entrer dans l'ancien collège cistercien auprès du contrôle des invitations. Au culot, encore une fois.

Nous nous retrouvons dans un petit amphithéâtre, une rangée pour nous, les fans, et les autres places occupées par des journalistes de la radio, de la presse écrite et de la télévision. Le groupe présente l'album avec un film d'une dizaine de minutes qui nous montre la séance photo de l'affiche du Stade de France. C'est ici aussi que nous entendons pour la première fois Un Ange à ma table.

La séance se termine par les questions des journalistes, je me souviens de l'une d'entre eux, qui travaille pour TF1, qui pose cette question sortie de nulle part à Boris, le guitariste : " pensez-vous que le rock est mort ? ". Éclats de rires dans la salle, Boris élude la question qu'il trouve, en effet, malvenue.

Après la conférence il est prévu un cocktail avec champagne et petits fours. Nous attendons dans une pièce la sortie du groupe, alignés les uns à côté des autres, filmés par des journalistes d'M6. Nicola apparaît et se dirige vers nous. Quand il arrive près de moi, je lui tends la main, qu'il esquive pour me faire la bise. L'instant est enregistré par les caméras du 66 Minutes d'M6.

Mes 7000 danses : Aventures en Indochine
Ma main, destinée à saluer Nicola, a fini sur son bras quand il s'est avancé pour me faire la bise. Juste à gauche (donc à ma droite), le fameux Christian. Copyrights Groupe M6.

Nous buvons ensuite du champagne avec toute l'assemblée. Nous rencontrons Francis Zégut, animateur star d'RTL2 qui suivait le groupe avec assiduité avant un revirement brutal et spectaculaire dont je ne connais toujours pas les tenants et aboutissants. Ce jour-là, nous parlons du dernier album en date d'AC/DC, qui semble faire du sur-place.

Nous sortons du collège en compagnie de Boris, passablement éméché. Je me souviens des autres autour de moi, appareils photo à la main, qui ne cessent de le mitrailler. Comme j'étais le seul à marcher à côté de lui sans vouloir l'immortaliser dans une mémoire électronique, il s'est accoudé sur mon épaule en me confiant, amusé : " Tu vois, c'est ça la célébrité ". Avant de repartir sur son Vespa bleu, prenant la rue en sens interdit.

Pendant la promo de l'album, il y a eu ce jour où je me suis retrouvé dans un studio avec la fille de Christian, Caroline, et deux autres gagnants d'un concours nous permettant d'assister à une interview puis à un petit concert du groupe en acoustique.

Christian m'avait dit, la semaine précédente, d'appeler un numéro pour faire un petit jeu en direct. Si je gagnais, à moi la place dans le studio.

J'appelle, on me met en relation avec le standard, je suis sélectionné pour jouer. J'ai l'animateur au téléphone pendant la page de pub, et j'entends des enceintes du studio la voix de ma concurrente. C'était Caroline. Christian nous a donné le tuyau en même temps, mais ne se doutait sans doute pas que nous allions nous retrouver face à face, sa fille et moi.

Le jeu est simple, il s'agit de reconnaître des titres d'Indochine sur leur intro. Bien sûr, nous ne révélons pas aux animateurs que nous nous connaissons en fait très bien.

Je gagne sur une confusion de Caroline, qui confond les titres Le Grand Secret et Le Grand Soir, mais la radio, charitable, dans un joli rebondissement, lui offre tout de même sa place.

Et nous voilà dans une petite rue de Paris, près de Bastille. Le groupe n'est pas très loin de nous, Nicola est en vert et violet.

Nous entrons dans les locaux de la radio, et nous installons autour d'une table dans un petit studio. Je suis à côté de Boris, sa guitare 12 cordes est posée presque contre mon siège.

À la pause pub, le groupe sort. Nicola me fait un signe de tête et me demande si ça va. Je n'arrive pas à savoir s'il me reconnait ou si c'est sa prévenance habituelle envers son public.

Nous sortons aussi pendant que la radio diffuse le nouveau single de The Offsprings, You gonna go far, kid. Comme nous aimons tous deux ce groupe, avec Caroline, nous nous mettons à danser comme des idiots. Nous voyons alors un peu plus loin Nicola, en conversation avec Alain, nous regarder en rigolant.

À la fin de l'émission, nous avons droit à quelques photos. J'ai amené mon reflex numérique Nikon spécialement pour l'occasion, et je montre à Caroline comment s'en servir pour me prendre en photo avec Nicola. Sur cette image, j'ai la bouche un peu ouverte car j'étais en train de répondre à Nicola qui me posait une question sur l'appareil photo.

Mes 7000 danses : Aventures en Indochine
" -C'est un réflex numérique ? ", " -oui c'est exact ! "

Un peu plus tard - ou peut-être avant ? - Indochine fait un nouveau passage sur le plateau de Taratata. Avec Christian nous nous précipitons sur les inscriptions, et nous avons rendez-vous, encore une fois, dans l'un des plateaux de la Plaine St Denis.

Il y a une sorte de rituel pour le public, avant chaque début d'émission de télévision. Il faut toujours se coltiner un chauffeur de salle, venu tenter quelques blagues pour mettre le public dans l'ambiance. Celui de Taratata m'est finalement plutôt sympathique, mais c'est quand même un moment assez pénible à passer.

Cette fois, comme il sait qu'il est en présence d'une majorité de gens venus pour applaudir Indochine, il demande si l'un d'entre nous veut venir en plein milieu du plateau pour chanter l'un des tubes du groupe.

Personne n'a le temps de répondre, Christian se lève d'un coup et hurle : " LUI, LUI !! ". Je le regarde et je découvre, horrifié, qu'il me pointe du doigt ! Et le chauffeur de salle qui m'invite à venir ! Je fais de grands signes pour lui signifier que, non, je n'ai aucune envie de venir chanter devant le public de Taratata. C'est à ce moment que l'ensemble de la salle se met à m'encourager pour aller chanter. Alors je prends mon courage à deux mains et je descends la tribune pour me retrouver au milieu du plateau.

Seulement, et c'est la petite particularité de l'histoire, la moitié du groupe est déjà installée. Il y a Shoes à sa batterie, Matu aux claviers et Marc Éliard à la basse. J'ai des sueurs froides à l'idée de me ridiculiser devant la moitié d'Indochine.

Je ne sais même pas quoi chanter, j'attends des suggestions. J'entends Le Lac quelque part devant moi, alors je me décide, d'autant que c'est un morceau que j'adore et que je m'amuse régulièrement à jouer à la guitare.

Sauf qu'ici je dois chanter a capella, je ne peux même pas assurer ma voix sur les accords d'une guitare.

Tant pis, j'y vais, sans penser à ma honte. Je chante le premier couplet et le public reprend avec moi. Soudain, je vois Shoes, devant moi, qui commence à m'accompagner en battant le rythme avec sa caisse claire. Je chante le refrain, toujours accompagné de Shoes, et je décide de terminer le morceau là dessus.

Après l'émission, des gens que je ne connais pas, qui étaient dans le public, sont venus me féliciter pour cette reprise improvisée.

Encore une fois, grâce à Christian, j'ai vécu un beau moment. Il a voulu ensuite m'inscrire à La Nouvelle Star mais cette fois j'ai dit non, faut pas déconner.

Mes 7000 danses : Aventures en Indochine
Une photo de Nicola lui-même, postée, je crois, sur le site du groupe. Je suis tout en haut, en noir à droite de la banderole, saluant.

En 2009, j'en ai terminé avec l'école de cinéma. J'ai un peu abandonné sur la fin, les sacrifices financiers demandés ont eu raison de ma volonté. Un prêt étudiant à rembourser à la sortie de l'école, je ne pouvais pas me mettre à enchainer les stages sous-payés dans l'espoir de percer quelque part.

Je décide, pour me refaire un peu, de prendre un job dans le magasin Saturn d'Aulnay Sous Bois. L'enseigne n'existe plus en France aujourd'hui, les magasins ont été rachetés par Boulanger. Comme je sortais d'une école de cinéma, on m'a proposé un poste de vendeur dans le rayon photo-vidéo.

J'y suis resté un an. La vente ne m'attirait pas vraiment, mais au moins je pouvais rembourser mon prêt, et vivre un peu à côté.

Dans le rayon des camescopes se trouvait une élégante caméra semi-professionnelle à 3000€, une Sony FX7, qui me faisait de l'oeil. Personne n'avait les moyens de l'acheter, aussi était-elle là, en exposition, histoire de monter un peu la gamme présentée.

C'était le début de la haute définition dans le marché grand public, et la caméra utilisait encore des cassettes mini-Dv (un enfer pour dérusher). J'avais une furieuse envie de la tester.

Un jour, un collègue du rayon avec qui je m'entends très bien m'apprend que, si je le souhaite, je peux emprunter du materiel au magasin pour le tester. Saturn encourage ces initiatives, ça leur permet d'économiser sur les formations de leurs vendeurs, puisque nous empruntons ces produits pour les tester durant notre temps libre.

Mais moi, je ne veux pas juste la tester. Je veux en profiter pour tourner un truc, n'importe quoi. Me vient alors une idée.

La date du premier Stade de France d'Indochine arrivant à grands pas, j'imagine filmer les fans qui, à n'en pas douter, vont se mettre à camper autour du stade quelques jours avant. Et, qui sait, peut-être en interroger quelques uns sur leur passion.

J'organise l'emprunt avec le magasin, en expliquant que je veux tester la caméra chez moi, ce qui est tout de suite accepté.

J'organise un peu mon petit projet, je réserve un hôtel dans l'avenue du Président Wilson la veille de la date prévue pour le concert.

J'arrive l'après-midi et je tourne jusqu'au soir, vers minuit. Certains fans, me voyant avec une caméra, me sollicitent d'eux-mêmes, pensant au départ que je fais partie de l'équipe d'Indochine.

Je leur avoue tout de suite que je fais ça de mon côté, mais que j'espère bien proposer le film au groupe. Alors ils m'encouragent et répondent avec enthousiasme à quelques questions.

L'une d'elles va même jusqu'à me proposer d'interroger Stéphane Hervé, le chanteur du groupe Dead Sexy Inc., qui est aussi vidéaste et qui réalise le making of du futur DVD d'Indochine consacré à l'évènement. Comme elle le connait un peu, elle attend sa sortie des locaux du Stade pour le héler et lui demander s'il veut bien se prêter au jeu. Ce jour là il n'a pas le temps, mais on échange nos numéros pour faire le petit entretien le lendemain, sur des marches à l'abri du soleil.

Le lendemain je pars tôt de l'hotel, je tente de filmer le lever du soleil mais je n'ai pas de trépied, le résultat dans le film est hasardeux. Je continue mon petit tour des fans, je filme les stands, les gros ours en rose rescapés d' Alice & June. C'est une ambiance de fête tout autour du stade, c'est comme un village utopique dressé pour une même passion le temps d'une journée.

Vers 18h, j'ai à peine le temps de filmer la foule, à travers les grillages, qui se précipitent dans l'enceinte une fois les barrières de contrôle ouvertes. Je mets ensuite ma caméra en consigne, croisant les doigts pour qu'il ne lui arrive rien, et je file en gradins rejoindre ma place.

Le lendemain de ce concert de folie, je partage mon enthousiasme sur Twitter, soulignant en passant ma petite déception de ne pas avoir vu le duo annoncé avec Jacques Dutronc. À mon grand étonnement, je reçois une réponse de Nicola en message privé qui m'explique que Dutronc a eu des caprices de star pour venir au stade, et qu'ils ont décidé d'annuler sa venue. Ébahi, je lui réponds en comprenant tout à fait sa position, même si je ne veux pas cesser d'admirer le chanteur. Nicola me répond que lui aussi continuera de l'admirer malgré tout. Ce que l'avenir prouvera puisqu'on le verra quelques années plus tard participer à l'émission consacrée à son anniversaire dans sa villa corse, et enregistrer en duo avec lui une nouvelle version de L'Opportuniste.

Vient le temps du montage. Il faut dérouler toute la cassette mini-Dv, puis organiser les rushs. Je veux utiliser de la musique, mais je ne veux pas me fermer des portes, j'ai peur que si j'utilise des morceaux existants cela n'empêche le groupe de diffuser le film pour des questions de droits d'auteur. Je préfère que la vidéo soit ignorée pour sa qualité inhérente plutôt que pour une bête histoire de droits.

Alors je compose moi-même la musique sur mon Mac, grâce à Logic Pro.

Une fois le film terminé, avec Christian nous repartons pour une nouvelle " traque au chanteur ". Cette fois, nous savons directement où aller, alors nous retournons dans le 13ème arrondissement, avec mon film sur un DVD, accompagné de celui de Justine.

Sous la pluie, Christian sonne encore une fois, et Alain ouvre de nouveau la porte. Mais cette fois, l'heure n'est plus à la cordialité, il a l'air bien plus agacé que la première fois. Il nous renvoie manu militari, tonnant qu'ici c'est un lieu de travail et que nous n'avons rien à y faire.

J'accepte la sentence, après tout il a raison. Je ne baisse pas les bras pour autant et décide de jouer le tout pour le tout. Il y a bien, à l'extérieur, une boite aux lettres au nom de KMS, alors j'y glisse les DVD, avec un petit mot qui explique la démarche et indique mes coordonnées, si jamais le film intéresse.

Et j'attends.

Quelques mois plus tard, un mail m'indique que j'ai eu raison de me servir en dernier recours de la boîte aux lettres.

Emilie se présente comme l'assistante de Nicola, et m'explique que ce dernier a vraiment apprécié le film, que j'ai intitulé un peu bêtement Le Long du Stade.

Il souhaite le diffuser sur les réseaux d'Indochine et me demande mon accord. Forcément, je saute de joie, et répond tout de suite par l'affirmative. Je suis ensuite mis en contact avec le webmaster du site Indo.fr, qui me demande une version plus compressée du film, et coupée en deux parties pour pouvoir tenir sur Youtube.

Ce que je fais, avec envoi d'une clé USB.

Quelques temps plus tard, le film est diffusé sur le site d'Indochine, annoncé dans les news et que l'on retrouve par la suite dans la catégorie " Vidéos ". Il y restera quelques temps, jusqu'à ce qu'Indochine change entièrement la charte graphique du site.

Mes 7000 danses : Aventures en Indochine
J'ai fait cette capture d'écran pour me remémorer encore longtemps la fois où mon film s'est affiché sur le site d'Indochine. Il est à gauche, sur le poste de télévision renversé, sur lequel on peut lire " reportage " Le Long du Stade " ".

Je crois que le film a été plutôt apprécié des fans qui l'ont vu. J'ai bien eu quelques commentaires désagréables qui me reprochaient de ne pas avoir évoqué Stéphane (??!) mais dans l'ensemble, c'était une très belle expérience, partie d'un coup de tête.

Aujourd'hui, je continue de suivre le groupe avec le même enthousiasme. J'ai été tout autant ébloui par la tournée Black City Tour, et l'image d'Alice Renavand, danseuse étoile, tournoyant au milieu du stade sous la pluie pendant que le groupe interprète Wuppertal est l'une des visions qui resteront gravées dans ma mémoire. Ainsi que celle d'une Asia Argento gigantesque au dessus d'un public médusé sur le 13 Tour, et le voyage interstellaire du début de spectacle.

Après un décalage d'une année entière pour cause de crise sanitaire, je suis, comme mes camarades inconditionnels du groupe, bouillant d'impatience à l'idée du Central Tour qui arrive, et d'un futur album d'ores et déjà annoncé. Impatient comme au premier jour.

En attendant, je me replonge dans toute l'histoire du groupe, dans ce beau et gros livre sobrement intitulé Indochine, écrit par Rafaëlle Hirsch-Doran, une autre fan qui, comme Oli De Sat en son temps, vit quelque chose de beau, quelque chose de grand. Et, inscrite en creux à l'intérieur, son histoire à elle, qui est un peu l'histoire de tous les fans d'Indochine.

Mes 7000 danses : Aventures en Indochine
Une image du film.

6.Sa Majesté des 7000 danses.

À quoi tient l'extraordinaire longévité d'Indochine, après 40 ans d'existence ?

À quoi tient son pouvoir d'attraction sans cesse réactivé sur les plus jeunes générations, confondant tous les âges dans la foule qui se presse à ses concerts ?

Personne ne connaît la réponse. Personne, pas même Nicola Sirkis, ne saurait en décrypter les raisons profondes.

J'ai tout de même envie d'avancer une théorie. Je pense que tout ça tient surtout de l'incroyable volonté de son chanteur/leader, de son pouvoir secret d'alchimiste et de sa capacité à savoir s'entourer des bonnes personnes au bon moment.

Quand je parle de son pouvoir secret d'alchimiste, cela mérite une petite explication.

J'ai un jour écrit, dans un texte à propos de l'album Black City Parade relayé sur le site d'Indochine (et récompensé d'un " merci " en message privé sur Twitter), que Nicola est comme une éponge qui absorbe tout ce qui l'intéresse et le touche.

Il me faut ici corriger. Il n'est pas une éponge, mais plutôt un creuset, le " lieu où diverses choses se mêlent, où une chose s'épure ".

Si la musique d'Indochine traverse les décennies, si elle se renouvelle pour correspondre à son époque, c'est par l'extrême curiosité de son chanteur aux aguets de toutes les nouveautés dans la pop et le rock, c'est parce qu'il a su s'entourer de gens qui ont aussi cette curiosité là, c'est parce qu'il est perméable à la littérature, au cinéma, à l'art contemporain.

Toutes ces influences qui tombent dans son creuset, d'où en sort une épure, passée au tamis de son goût pour la mélodie directement accessible, pour la musique dansante et parfois sautillante.

Ce n'est pas une recette qui se reproduit facilement. Il faut que cela soit naturel, sincère, sinon on ne voit que le cynisme marchand de la pop FM.

Chez Indochine, c'est la sincérité de ces penchants là, musique populaire et goûts exigeants, qui fait, probablement, son succès auprès d'un public aussi large.

Je m'étonnais, quand j'étais encore à l'EICAR, qu'un fan hardcore de métal parmi mes camarades vienne un jour me parler de l'album Alice & June qu'il avait beaucoup apprécié. Il y était venu, en fait, par le groupe Aqme, qui est en duo avec Indochine sur le titre Aujourd'hui je pleure.

Et quand on regarde la population réunie en concert, il suffit d'observer les t-shirts arborés pour se rendre compte de la variété des profils des fans d'Indochine.

Je pense qu'il est là, le secret du groupe. La curiosité sans bornes, le goût des défis impossibles (quel autre groupe que celui emmené par Nicola Sirkis aurait bien pu avoir l'idée de percher un écran gigantesque au plafond des zéniths de France ?) et le pouvoir d'alchimiste de son leader.

Après toutes ces années, j'arrive toujours à être surpris, à attendre le prochain album avec impatience et à vouloir faire plusieurs dates des tournées annoncées.

Mon admiration infaillible pour ce groupe m'a emmené sur des chemins que je n'envisageais pas, un parcours parsemé de rencontres décisives dans ma vie, qui serait aujourd'hui tout autre si j'étais passé à côté de l'album Paradize qu'un type que je ne connais pas a rapporté un jour, devant moi, à Aurélien, l'un de mes meilleurs amis.

C'est drôle, à quoi ça tient parfois.

Quand on est un artiste reconnu, de cette stature, est-ce qu'on y pense, de temps en temps, à toutes ces vies que l'on transforme ? N'est-ce pas, parfois, terrifiant ?

C'est tout de même une belle position, quand on a ce pouvoir là. Pas le pouvoir d'un roi non, pas celui d'un gouvernant. Encore moins celui d'un gourou ou - pour ma part en tout cas - d'une idole.

Non mais celui, incontesté, de Sa Majesté des 7000 danses.

Mes 7000 danses : Aventures en Indochine
Un concert un jour, quelque part...


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