Alice, disparue - de Dominique Paravel (éd. Serge Safran)

Lyon, Venise. Aude passe d’une ville à l’autre, d’un temps à un autre. Venise, quand elle y arrive à la sortie de la gare, c’est cela : « succession d’apparitions fantomatiques, vagues palais, fenêtres en ogives éclairées, statues montant la garde dans des jardins invisibles, toute une ville naissant peu à peu de l’eau noire ». Un souvenir et Alice silencieuse. L’auteure prend le temps d’installer Aude, avec Alice et d’autres jeunes de leur âge, venus de divers pays d'Europe, dans ce vieux palais abandonné où ils partagent le quotidien, les rêves, les désirs, les apprentissages. Alice est une artiste, toujours une performance en tête, et un appareil photo à portée de main. Ces jeunes gens découvrent la vie, l’engagement dans une ville mystérieuse et une Italie qui vit alors ce qu’on appellera les « années de plomb ». Quarante ans plus tard, Aude, mariée, enseignante, mène une existence assez terne quand elle décide de rechercher Alice, disparue un jour sans explication, peut-être morte, qu'elle n'a jamais oubliée, mais dont elle a perdu la trace. Elle va se mettre en quête de leurs compagnons de jeunesse, pour savoir si quelqu’un sait quelque chose. Le livre est cette quête.

Aude, dans le palais, écrit un roman sur les murs. Le roman de Dominique Paravel y prend peut-être sa source. Peut-être aussi un peu dans le titre de Proust, Albertine disparue, où il sera question aussi de Venise, mais sans doute pas de la même Venise. Car il s’agit non seulement de la recherche d’Alice, du retour sur les années de jeunesse, mais aussi du passage du temps sur les villes, sur celle-ci - où on « ne vient pas par hasard » -, et sur les autres qui changent, comme l’écrivait Baudelaire, « plus vite, hélas, que le coeur des mortels ».