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Entretien avec Saïkaly

Publié le 07 janvier 2019 par Captain_h0wdy @twit2mat
Entretien avec Saïkaly

Quelques années après s'être fait connaître en tant que gagnant de la Nouvelle Star puis après avoir sorti son premier album A Million Particles, Saïkaly fait son retour avec un second album qui paraîtra en février prochain. Le premier extrait de ce disque, Jeux d'ombres, nous laisse entr'apercevoir l'univers unique du jeune homme à travers un clip plein de signes à déchiffrer, autant au niveau du visuel que des paroles. J'ai rencontré Saïkaly il a quelques semaines pour parler des ses projets et de sa vision de la création artistique.

Pourquoi avoir choisi de changer de nom quelques années après le début de ta carrière ?
Je n'ai pas complètement changé de nom, j'ai seulement enlevé mon prénom Mathieu. Mais ça s'explique par le fait qu'il y a une mutation entre le premier et le deuxième album et par le fait que je ne serai pas seul sur scène puisque je serai accompagné d'autres musiciens. J'aime le fait que Saïkaly peut être une personne mais aussi représenter 100 personnes, que ce soit pour moi une façon d'être plus libre mais en même temps une continuité pour que les gens ne soient pas perdus. En plus c'est un nom qui ne veut a priori rien dire et qui peut donc tout dire en même temps. Si j'ai gardé Mathieu Saïkaly après la Nouvelle Star c'est parce que je n'avais pas le choix, c'est sous ce nom que je m'étais fait connaître, mais si j'avais choisi un autre vecteur j'aurais sûrement adopté un autre nom. Mais bon difficile d'imaginer ce que j'aurais fait dans un passé parallèle ! (rires)

Ton single Jeux d'ombres, premier extrait de ton futur disque Quatre murs blancs, est sorti en mi-novembre. Comment décrirais-tu ce titre ?
C'est une chanson qui essaye de capturer les sentiments de quelqu'un qui s'interroge sur la nature des relations entre les êtres humains en observant autour de lui et en lui-même. Et parfois il est un peu perdu à cause de la façon dont les gens se traitent. Jeux d'ombres, de par son titre, parle de toutes les illusions qui constituent ces relations et le but est de ne pas faire comme si elles n'existaient pas, sans forcément en les critiquant mais seulement en restant lucide. C'est délibéré de ma part de prendre un point de vue qui essaye de décortiquer tous les fuselages d'une relation.

Pourquoi as-tu choisir de te travestir dans le clip ?
Je trouvais que le travestissement était un bon moyen de représenter une illusion qui s'assume. Un travesti est un homme déguisé en femme et tout le monde sait que c'est un homme déguisé en femme mais cela ne l'empêche pas de se comporter comme une femme et d'en venir à nous faire croire qu'il s'agit vraiment d'une femme. Cette illusion assumée a un parallèle intéressant avec le couple car il peut arriver que dans un couple il y ait des illusions assumées sous forme de non-dits ou de tabous. Ça paraît un peu fou quand on y pense d'un point de vue extérieur par rapport à tous les idéaux d'amour pur, tout ça... Je trouve qu'il y a un contraste intéressant par rapport à la réalité du couple et à l'image idéalisée qu'on s'en fait. Et le fait d'associer tout ça à l'image du pantin en bois me plaisait aussi beaucoup parce qu'il s'agit d'une figure illisible. Il a la poker face ultime, il a tout compris à la chanson de Lady Gaga. (rires) En tout cas ce qui m'intéressait vraiment dans cet assemblage de scènes, c'était d'avoir deux personnages qui de par leur nature jouent avec les notions de vérité et d'illusion.

Est-ce que tu dirais que c'est un morceau représentatif de l'univers de Quatre murs blancs ?
Jeux d'ombres représente bien l'album parce que le disque parle beaucoup de la place des illusions dans la société et de la tentative d'explorer les rapports entre les humains pour essayer de toucher un noyau dur et creuser du côté de l'identité pure. Ça se fait à travers la force, la douceur ou la douleur mais je pense que le fil rouge est cette exploration. Et Jeux d'ombres rentre très bien là-dedans en partie à cause de ses différentes dynamiques, puisque dans le morceau comme dans le reste de l'album il y a des moments qui sont un peu vénères, comme la fin de la chanson alors que d'autres sont très doux, comme le premier couplet qui est un guitare/voix. Donc c'est un titre qui définit bien ce qu'on peut retrouver dans l'album, même si sur le disque certains morceaux sont l'extrême des émotions exprimées dans Jeux d'ombres. C'était hyper important pour moi que le propos soit tenu du début à la fin. C'est un mélange cohérent de tableaux et d'émotions : il y a des moments de déception, des morceaux plus forts et puissants que d'autres alors que certains passages sont plus cool et tranquilles pour montrer que derrière la colère il est possible de trouver une forme de paix.

Tu as dit qu'il y avait une sorte de mutation entre les deux albums. Est-ce que c'est la raison pour laquelle tu as attendu si longtemps avant de préparer la sortie de ce nouveau disque ? Qu'est ce qui a changé pour toi entre ces deux albums ?
La manière dont celui-ci a été fait a changé parce que je ne suis plus en contrat avec Universal, mon projet n'allait plus avec la structure du label. La rupture s'est passé environ un an après la sortie de mon premier disque. L'année d'après, en 2017, j'ai monté un label sur les conseils de mon manager et on est partis à la recherche de subventions pour financer le nouvel album. Pendant ce temps je continuais d'écrire, ensuite on a tout mixé et masterisé. Du coup si tout le processus a pris autant de temps c'est parce qu'on a commencé par monter la structure puis il fallait comprendre comment la faire fonctionner et chercher un tas de personnes pouvant m'entourer, c'est-à-dire des distributeurs, éditeurs, attachés de presse... C'est un cadre très différent de celui du premier album parce qu'on passe d'une major à un système indépendant et c'est ce qui me fait très peur mais également ce qui rend le projet si excitant ! C'est un nouveau départ et c'est pour ça que je vois ce disque comme étant bien plus personnel, donc forcément j'ai vraiment une attente, j'ai envie qu'il parle aux gens.

Est-ce que, pour ces raisons, tu pensais à la future réception de l'album à sa sortie pendant que tu le composais ou bien est-ce que tu étais complètement focalisé sur la partie créative sans trop penser à la suite ?
La démarche créative de cet album est plus personnelle que celle du premier, mais ça s'explique par le fait que j'étais plus jeune, que je me cherchais encore beaucoup et que parfois je voulais inconsciemment me prouver des choses à cause de mes influences musicales. Ici j'ai vraiment essayé d'aller chercher la musicalité de mon coeur et c'est tout ce qui comptait pour moi. Je ne voulais pas me poser la question de savoir si telle ou telle mélodie est originale où si c'est le genre de chose qui marche en ce moment. Tout ce que je souhaitais, c'était d'être hyper sincère et d'avoir une démarche simple. En faisant les choses de cette manière j'espérais aussi faire une oeuvre bien sentie qui pourrait avoir une dimension intemporelle, qui serait dans son temps tout en étant hors du temps. Mais du coup tout ça me rend encore plus vulnérable parce que vu que mon projet est très honnête, si je me prends un mur ça fera vraiment mal !

Pour finir, quels sont les oeuvres et artistes qui te plaisent le plus en ce moment et que tu recommanderais ?
Je conseille d'écouter les sons de Emka, qui est le projet de covers de ma guitariste Marion avec des compos à venir. Il y a aussi Dismaze, le groupe de sa demi-soeur, le projet Atoms for Peace de Thom et Flea des Red Hot parce que j'aime beaucoup la façon dont ils construisent leurs mélodies et leurs sons en général. Dans le genre électro j'adore Lali Puna, et dans le style folk j'ai beaucoup aimé l'album que Sufjan Stevens a sorti en 2015, Carrie & Lowell. Il y a aussi le dernier album de Bon Iver, 22, A Million. Je n'ai pas aimé tous les morceaux mais je trouve sa démarche artistique très intéressante, je l'admire beaucoup. Et dans la liste d'artistes que j'aime il y a également Mac Demarco, Tamino dont j'ai entendu quelques morceaux vraiment sympa et bien sûr The Strokes !

Découvrez ci-dessous le clip de Jeux d'ombres :

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