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L’essaim sismique, source des guerres de l’information à Mayotte

Publié le 13 décembre 2018 par Infoguerre

L’essaim sismique, source des guerres de l’information à Mayotte

L’essaim sismique à Mayotte relève d’une particularité qui n’a pas trouvé commune mesure selon les experts et les scientifiques dépêchés pour prendre acte de la situation et pour tenter de rassurer la population face à l’effroi et à la psychose que cela a pu causer : de mai à novembre 2018, on compte plus de 1400 secousses parfois s’approchant d’une magnitude six sous l’échelle de Richter. L’affrontement entre le Collectif des Citoyens de Mayotte“ et l’État français ne peut se situer au niveau de l’origine de ces secousses car l’ADN du rapport entre Mayotte et la France réside dans une forme de transaction entre le droit à la protection et le renoncement au droit à sa souveraineté. Ce qui veut dire que l’expansion économique par la voie de l’appropriation des ressources à proximité des eaux de Mayotte n’a nullement causé un doute pour la société civile au sujet des termes de cette transaction. Les affrontements au sujet de l’énergie fossile se situent dans des rapports entre la France et la Chine où la première utilise son passé coloniale et civilisatrice pour consolider des liens en permettant l’accès au pouvoir de ces principaux alliés politiques dans la région et le dernier par le biais d’investissements vers des secteurs stratégiques notamment dans les infrastructures et la norme afin de mettre en œuvre sa théorie de la “String Pearls“.

Une supposée guerre de l’or noir

Malgré les tensions qui existent entre le “Collectif des Citoyens de Mayotte“ et l’État Français sur le niveau d’investissement en matière de ressources humaines et matériels dans l’économie Mahoraise, ce dernier a pris le dessus au sujet de l’interprétation à donner sur l’origine de l’essaim sismique. Il est vrai que la possibilité que Mayotte et ses alentours soient dotés de sources gazières et pétrolières relève de simples hypothèses sans réel fondement empirique. Toutefois, ce doute permanent se rajoute à d’autres polémiques qui participent à créer une forme de dissonances au moins sur la finalité des affrontements entre les puissances parties prenantes.

Les services de la préfecture de Mayotte ont déployé des actions de communications en direction de la population avec le soutien du BRGM au lendemain du pic du 15 mai 2018 : il avait atteint 5.8 de magnitude sous l’échelle de Richter. De plus, les médias locaux et nationaux relaient ces informations officielles et participent à balayer toute hypothèse d’une quelconque activité humaine pouvant-être la cause de telles manifestations. En opposition à certains experts qui rappellent que jamais un essaim de séismes ne s’est manifesté sur une période dépassant trois semaines. On est face à un phénomène exceptionnel qui persiste depuis bientôt six mois, et l’idée qu’une activité de forage qui se réalise à 50 kilomètres des côtes Mahoraises en soit la cause principale est devenue un secret de polichinelle partagé par l’ensemble de la population.

Ces séismes se produisent de manière simultanée en marge de trois événements majeurs. D’une part, la crise sociale à Mayotte qui durent depuis le mois de février dernier, elle accusait l’abandon de l’État en matière de développement du territoire. Aujourd’hui, les militants  du “Collectif des Citoyens de Mayotte“ utilisent le laxisme de la France sur la politique d’immigration et de sécurité publique pour faire pression dans les relations diplomatiques franco-comoriennes. Aux Comores, une crise politique survient au lendemain du changement de la constitution par voie référendaire. Le maintien possible du président Azali est un gage favorable aux intérêts de la France pour l’exploitation des richesses minières situées dans les eaux Comoriennes. Et enfin l’issue des élections Malgaches après les récents affrontements internes déterminera la nature des relations entre la France et Madagascar au sujet de l’appropriation des îles éparses et notamment Juan de Nova, située à 538 kilomètres des côtes Mahoraises.

Les compagnies d’exploration ont affiché un intérêt fort pour le canal du Mozambique qui était  une zone peu exploitée : on compte cent cinquante bassins sédimentaires explorés dans le monde sur trois cents existants. Dans une bataille entre Ségolène ROYAL alors ministre de l’Ecologie du Développement Durable et de l’Energie et les Sociétés Marex et Sapetro Petrolium, en septembre 2015 le tribunal administratif de La Réunion s’est prononcé en faveur de ces derniers pour prolonger les activités de forages à Juan de Nova jusqu’au 30 décembre 2018. La fin de l’essaim de séismes à Mayotte coïnciderait-elle avec celle de ce contrat ?

La communication officielle des services de l’État légitimée par le discours scientifique du BRGM inonde l’opinion publique au fur et à mesure des phénomènes sismiques malgré les doutes que laisse transparaitre le “Collectif des Citoyens de Mayotte“ sur leurs origines. En effet, la science et la technique sont des instruments de légitimation qui contribuent à masquer les affrontements entre la France et la Chine sur le canal du Mozambique, qui est devenu  la préoccupation de certaines puissances.

La “String Pearls“ : une offensive contre les intérêts français

Dans un contexte de tensions sociales à Mayotte et de crises politiques aux Comores et à Madagascar, la France occupe une place importante dans les négociations et les questions relatives aux médiations en période de dysfonctionnements. Dans ce cas, les offensives de la Chine sont une alternative qui ont un enjeu économique souvent impuissantes face à une emprise politique et sociale dans ces territoires. L’expansion de la stratégie chinoise sera vaine face aux intérêts français où le contentieux historique “Mayotte“ pourrait être le point de rassemblement. La France reste un partenaire privilégié des Comores en étant le premier bailleur et ancienne puissance coloniale alors que le contentieux historique entre ces deux parties reste un argument de taille dans leurs rapports diplomatiques. D’un autre côté, la Chine poursuit sa théorie de la “String Pearls“ en s’introduisant sur le marché de la normalisation dans l’Union des Comores au même titre que l’Union Européenne, c’est la conséquence de plus d’une quarantaine d’années d’investissements financiers. Elle reste aussi un allié majeur sur le plan idéologique puisque la Chine a été un des premiers Etats à reconnaître l’État Comorien au lendemain de sa prise d’indépendance.

Les actions offensives de la Chine dans l’océan indien avec une forte appétence pour le gaz naturel devenu une source d’importance stratégique en matière énergétique, devront se confrontées à des crises politiques à Madagascar et aux Comores. Ces dernières ressemblent à une sorte d’éternels recommencements dont la France semble avoir le secret: elle contribue souvent à l’élection ou au maintien au pouvoir de ses principaux alliés. Les répercussions sur la fragilisation de l’État comorien a pour conséquence l’entrée d’insurgés et d’opposants qui demandent l’asile politique à Mayotte mais en vain. En marge des intérêts français, le “Collectif des Citoyens de Mayotte“ occupe la façade du bureau des étrangers depuis près de quatre mois et réclame une politique sécuritaire plus répressive et une reprise des reconduites à la frontière des migrants comoriens. Des accords sont en cours pour la reprise des reconduites ce qui permettra le retour des insurgés et des opposants, elle ne se fera certainement pas sans conséquences désastreuses.

La montée du populisme à Mayotte est le corollaire des contradictions qui existaient jadis depuis une quarantaine d’années dans les relations entre la France et les Comores. À travers ces contradictions, la Chine souhaite prendre une place importante au profit d’un partenariat économique qui passe par le fait de partager une vision idéologique commune au sujet du contentieux opposant la France aux Comores. Néanmoins, l’État français a permis de maintenir une communication constante à Mayotte malgré l’évolution des tensions sociales, en utilisant le BRGM comme quotient scientifique et comme partenaire dans l’expansion, et en utilisant les associations locales comme partenaires dans cette guerre de l’information.

Faissoil Soilihi

Sources

Ch. Harbulot, Manuel d’Intelligence Économique – p.22 à24 et p.34

Rapport démontrant l’absence de recours aux techniques interdites du IV de l’art.6 de la loi n°2017-1839 du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu’à exploitation des hydrocarbures

EV Louis Bussière, Le gaz : nouvel or noir ? Le cas de l’océan Indien. Note de Synthèse.

AFP publication du 15/06/2018, Mayotte : avec plus de 1400 séismes en un mois,la population vit dans la peur.

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