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Ces deux agronomes rebelles se battent pour que les inondations fassent moins de dégâts

Publié le 24 juin 2016 par Blanchemanche
#inondations
LeHuffPost | Par Annabel Benhaiem
Publication: 23/06/2016

BOURGUIGNON
Lydia et Claude Bourguignon, un couple de scientifiques attaché à la terre. | Wikicommons
INONDATIONS - Lydia et Claude Bourguignon aiment la terre. Et ils ont l'impression qu'on se fiche d'elle. Engrais, pesticides, labours sauvages... la liste des maltraitances de l'agriculture intensive les rend malades. Selon ces deux scientifiques, les inondations de fin mai ne sont que le retour du bâton. Alors ils travaillent d'arrache-pied depuis 25 ans pour que l'on entende leur discours."Sols rudoyés et inondations sont étroitement liés, assure Lydia Bourguignon auHuffPost. Pourtant quand on évoque ces catastrophes, on parle du bétonnage de nos campagnes ou des bords de mer, mais jamais du problème des sols."Invités à la Nuit de l'agroécologieLeur obstination a fini par payer. Ils sont invités ce jeudi 23 juin au soir par le ministère de l'Agriculture à venir à Paris fêter la première édition de la Nuit de l'agroécologie, constituée de 120 événements en France pour valoriser les pionniers et les nouveaux adeptes de la culture raisonnée.Les époux ont pris acte, mais ils estiment que les informations ne parviennent pas encore aux oreilles de tous. Alors, pour expliquer le lien entre ces deux éléments, Lydia a un exemple très parlant:
"En 1910, la crue de la Seine a été la plus haute de l'histoire de la ville. Elle a eu lieu en décembre, période pendant laquelle la végétation était dormante. Pas de feuille, pas de céréales sur les sols. L'eau n'a donc pu être retenue ou absorbée.Mais en 2016, les inondations ont eu lieu au mois de mai, époque de l'année où la végétation est luxuriante dans notre climat tempéré. Elle aurait dû être en mesure de pomper toute cette eau qui arrivait. La réalité nous a rattrapés. Les sols, du fait de l'utilisation de fertilisants, de produits de traitement, de tracteurs trop lourds qui labourent les sols trop profondément, se referment, s'assèchent. Plus rien ne retient l'eau qui vient les arroser. il n'y a plus de vie dans ces terres."
Leur bataille contre le labour violent leur a attiré des inimitiésLe labour trop violent, c'est l'autre facette de leur combat.
"Si vous retournez la terre trop en profondeur, explique Lydia Bourguignon, la terre du dessus se lisse à cause du tracteur, et devient dure presque comme du béton. L'eau ne peut plus y rentrer. Si on a un peu de pente à ces endroits, l'eau qui tombe du ciel se met en mouvement, se charge de terre et devient érosive. Or, plus elle est dense, plus elle est capable de soulever des cailloux, puis des blocs de pierre, puis bien pire. Elle se répand alors en contrebas causant de nombreux dégâts."
Alertés très tôt par ces dégradations des terres, ils sont allés à la rencontre des paysans pour leur montrer les dégâts causés par les labours et tenter de leur faire entendre raison. Mais les époux Bourguignon ont souvent été mal reçus. Dans les années 1980, remettre ces pratiques en cause relevait du crime de lèse-majesté, avec les agriculteurs dans le rôle des rois.
Soigneurs de Terres par sphere34
"L'INRA nous a demandé de nous taire"D'ailleurs, l'INRA, l'Institut national de recherche agronomique, leur a tourné le dos. "On a travaillé pour eux au début de notre carrière, raconte Lydia Bourguignon. Mais nos rapports inquiétants sur l'état des sols ont été systématiquement écartés. La direction nous a demandé de nous taire. Alors, nous en sommes partis en 1989. Nous avons fondé notre propre laboratoire, le LAMS, Laboratoire d'analyses microbiologiques des sols."25 ans après, les organismes publics prennent la mesure du problème. Et aujourd'hui, le soutien vient directement du ministre Stéphane le Foll. Il affirme au HuffPost son ambition de remettre la question des sols au coeur des débats agricoles de demain". "Les sols ont été les grands oubliés de la révolution technique et technologique qui s’est beaucoup focalisée sur la chimie et la génétique."La Nuit de l'Agroécologie, c'est la concrétisation de quatre années centrées sur la thématique pour Stéphane Le Foll.
"L'agroécologie, c'est la combinaison des performances économiques, environnementales et sociales, explique-t-il. On peut obtenir d'excellents rendements en préservant la biodiversité et en travaillant avec des organisations collectives."
"Il va falloir que les hommes apprennent à respecter leur sol, affirme le ministre auHuffPost. J'ai demandé à la direction générale du ministère de commencer à définir des critères en terme de mesure de la matière organique, de la biodiversité, de la couverture des sols, sur toute la France. Ces indices nous permettront d'aller vers de nouveaux modèles de production performants sur le plan économique et environnemental."Au bout des doigtsLe ministre prêche des convaincus. Ce type de solutions, les époux Bourguignon les ont déjà élaborées et mises en oeuvre auprès de plusieurs agriculteurs. Ils militent pour l'arrêt des labours violents, notamment quand il rentrent à plus de 10 centimètres dans la terre. Ils préconisent de travailler en surface."Nous devons aussi remettre de la matière organique dans les terres. Depuis l'après-guerre, cette matière a diminué de moitié. Et il faut aussi replanter des haies, les seules capables, avec les arbres et les forêts, de faire rentrer l'eau en profondeur dans le sous-sol."arbreUn sous-sol qui ne demande qu'à grouiller de petits vers de terre pour alimenter les racines et produire de bons aliments pour nous tous.http://www.huffingtonpost.fr/2016/06/23/degats-inondations-agriculteurs-rebelles-se-battent_n_10633728.html?utm_hp_ref=france

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