Le thème possède une variante beaucoup plus rare et spécialisée, dans laquelle le Pantin est un Mannequin d’artiste : face à lui, nous trouverons presque toujours un Homme, et presque toujours un Peintre.
Le modèle et le mannequin
(Berthe dans l’Atelier)
Boldini, 1873
Des étoffes sont éparpillées sur le plancher, sur le fauteuil, sur le canapé. Un tapis froncé conduit jusqu’à des pieds, des mollets et des jambes nues. Ce crâne luisant est-t-il celui d’un chauve sur lequel la fille est vautrée, lui plaquant le visage dans son aisselle ?
Heureusement la présence du chevalet dégonfle la double scandale de la femme habillée et de l’homme nu, de la fumeuse triomphante et du mâle transformé en pantin : puisque celui-ci en est réellement un, un de ces mannequins d’atelier sur lesquels les peintres étudient le tombé des étoffes. Ouf, la scène érotique n’est qu’une scène de genre.
Et le perroquet sur son perchoir, emblème et compagnon de la femme sensuelle, semble placé là pour affirmer qu’elle et lui sont bien les deux seuls êtres animés de la pièce.
Boldini, La toilette
Berthe était la modèle avec laquelle Boldini vivait à cette époque, en toute impudeur.
L’atelier de l’artiste
Luigi Bechi, Fin XIXème
La scène de genre est plus fine qu’il n’y paraît : le vieillard n’est pas le peintre, la petite fille n’est pas le modèle. Tous deux portent des habits populaires, mais se sont endimanchés pour rendre visite au maître des lieux.
En son absence, c’est à son substitut humoristique qu’il s’agit de faire la référence : trônant sur le divan, drapé pour la pudeur et chapeauté de travers pour la blague, le mannequin à la barbe rousse tend vers la fillette une main accueillante, tout prêt à montrer à sa jeune visiteuse le contenu du carton à dessin.
Ce que les peintres sont pour les femmes,
les mannequins le sont pour les fillettes :
un objet amusant et quelque peu ridicule.
Portait de Bechi,
Boldini, 1865
Voici Bechi en vrai, avec sa belle barbe rousse.
Sur le thème du mannequin, il n’est pas interdit de penser que l’un des peintres ait pastiché l’autre. Reste à savoir lequel.
Image en haute définition : http://www.sothebys.com/en/auctions/ecatalogue/2007/19th-century-european-art-n08355/lot.116.html
L’homme et le pantin,
portrait du peintre Henri Michel-Lévy
Degas, vers 1878, musée Gulbenkian, Lisbonne
Les deux tableaux
L’oeuvre du peintre impressionniste Henri Michel-Lévy a presque totalement disparu : on a pu identifier le tableau de gauche, Les régates, exposé au Salon de 1879. Mais celui du fond n’est pas certain : il pourrait s’agit de la Promenade au parc, exposée au Salon de l’année précédente.
Le pantin
Le pantin en robe rose, seule note de couleur dans cette toile sinistre, est manifestement celui qui a permis de peindre la femme du tableau de gauche : simulacre d’un simulacre.
On pourrait tout aussi bien dire qu’elle vient de sortir du tableau de gauche,
pour rejoindre le peintre dans sa solitude.
Le peintre
L’attitude de ce dernier est étrange : adossé à la surface peinte, comme si celle-ci n’avait pas plus de valeur que le mur, il contemple la poupée d’un regard en biais.
On pourrait tout aussi bien dire qu’il vient de sortir du tableau du fond
pour rejoindre la poupée dans l’atelier.
Une tension sexuelle
Une tension sexuelle gênante lie ces deux êtres opposés : l’homme de chair debout en noir et blanc, la femme de son affalée en rose et rouge, sous la boîte à couleurs ouverte…
L’Intérieur, ou le Viol
Degas, 1868-69,Philadelphia Museum
…auto-citation du mystère charnel qui, dans ce tableau réalisé dix ans plus tôt, met également en scène dans un huis-clos la puissance menaçante de l’Homme, adossé les mains dans les poches, et le retrait de la Femme qui lui tourne le dos, de part et d’autre d’une boîte à couture.
Sauf que, dans la version lisboète, dénoncé par un bout de liquette, l’Artiste manifestement bande…
.. à l’instar des pinceaux près du gant.
En plus d’un portrait de Henri Michel-Lévy, peintre sincère et solitaire hanté par les fastes des Fêtes Galantes et le regret du Rococo, c’est surtout un autoportrait de Degas qui transparaît, en homme « frustré et amer, dont les besoins profonds sont restés inassouvis ».Théodore Reff[1]. Ce tableau profondément pessimiste illustre l’état d’esprit d’une lettre de 1884 :
« Si vous étiez célibataire et âgé de 50 ans, vous auriez de ces moments-la, où on se ferme comme une porte, et non pas seulement sur ses amis; on supprime tout autour de soi, et une fois tout seul, on s’annihile, on se tue enfin, par dégoût. » [1].
Son modèle préféré (His Favorite Model)
John Ferguson Weir, 1880-86, Yale University Art Gallery
Dans le tableau dans le tableau, une femme drapée se contemple dans un miroir, sans aucun contact avec son reflet.
Dans le tableau, le peintre tend les bras à son mannequin-femme : si le reflet figé est intouchable, cette autre forme de reflet en 3D que constitue le mannequin, est quant à lui souple et manipulable.
Ces bras tendus transgressant la limite du cadre posent brillamment toute la question du rapport de force entre le peintre et son modèle :
l’artiste réussira-t-il à le faire entrer dans le cadre, ou bien
le modèle résistera-t-il, éloignant le peintre de l’oeuvre qu’il a derrière la tête ?
Dans l’atelier
Wilhelm Trübner
Dans l’atelier
Wilhelm Trübner, 1872,
Bayerische Staatsgemäldesammlungen – Neue Pinakothek München
Intérieur d’atelier
Wilhelm Trübner, 1888,
Museen der Stadt Nürnberg, Gemälde und Skulpturensammlung
En 1872, le thème reste obscur dans tous les sens du terme. Sans le titre, impossible de comprendre que cet homme en chapeau et manteau noir, au visage dans l’ombre et qui vient de jeter son mégot, est un peintre venu observer de plus près son modèle ; et que sa main gauche posée sur le dossier n’est pas en train d’esquisser une caresse, mais de rectifier une position.
En 1888, l’homme a gardé le même costume et presque la même pose, sinon que sa main droite ne tient plus son menton, mais un bloc de papier. Ce pourrait être un livre de poèmes lu à une jeune fille, mais la posture figée de celle-ci nous fait comprendre qu’il s’agit d’un modèle, et que le bloc est un carnet de croquis.
Le tableau dans le tableau
Prométhée pleuré par les Océanides, Wilhelm Trübner, 1889
Trübner réalisera cinq versions du thème de Prométhée [2]. Celle de 1889 suit le « Prométhée enchaîné » d’Eschyle : on le voit attaché à son rocher, puni pour avoir donné le Feu aux Hommes. Mais Prométhée est aussi celui qui a façonné les humains à partir d’eau et de terre, pour qu’Athéna ensuite leur insuffle la vie. La présence du Pantin amorphe sous le tableau en cours d’élaboration suggère fortement que le thème de la composition n’est rien moins que celui de la Création, et de la manière de donner vie.
Le paravent
Le paravent indique comment lire le reste de la composition :
- sur le panneau de gauche, un tissu rouge et or est posé, un échantillon de cuir ou de papier décoratif est collé, un visage les yeux ouverts est griffonné ;
- le panneau de droite porte seulement un tissu vert, qui fait ressortir la chevelure rousse ;
- le panneau du centre porte un autre tissu rouge et or, orné de grandes palmettes : ce motif tape-à-l’oeil marque l’endroit critique où deux regards convergent : celui du peintre sur le modèle, celui du spectateur sur le tableau.
Si Trübner a choisi de centrer sa composition autour d’un motif aussi voyant, ce n’est pas seulement par intérêt pour les arts décoratifs ou le japonisme : mais parce qu’il souhaitait que nous donnions un sens à cette pyramide inversée composée, de bas en haut, d’une, de deux, puis de trois palmettes.
Le schéma du tissu
Supposons que la palmette du bas, toute proche du carnet de croquis vierge, représente l‘oeuvre en gestation.
Supposons que les deux palmettes du dessus, qui joignent les yeux de l’homme et de la femme, soient les deux pôles de ce processus créatif : le Peintre et le Modèle.
Alors la ligne du haut pourrait schématiser l’Oeuvre achevée : un motif qui incorpore une moitié du Peintre, et une moitié du Modèle, car l’Art ne peut prétendre faire entrer dans le cadre et dans le plan du tableau la totalité du Réel.
L’homme aux poupées
Jean Veber, Salon de 1896
Cet étrange tableau, aujourd’hui disparu, rendit perplexe les commentateurs du Salon :
« L’enseignement moral de cette allégorie, en tout cas le morceau capital c’est l’insolente nudité d’une grande fille qui s’étale, jambes ouvertes, près de notre rêveur de chimères, sans qu’il daigne y jeter les yeux. Revanche, appel, ironie de la réalité méprisée ? Mystère. » [3]
Le mystère ne s’expliquera qu’en 1899, avec la parution de « L’Homme aux poupées », de Jean-Louis Renaud, avec quinze illustrations par Jean Veber.[4]
Illustration pour « L’homme aux poupées »
Jean Veber, 1899
Voici l’histoire dans ses grandes lignes :
Le héros, « Menzel a une manie, qu’il satisfait à heure fixe. Chaque jour, à deux heures de l’après-midi précises, il entre dans une pièce plongée dans la pénombre et habitée par un petit peuple nombreux : ses poupées… Son plaisir est de les contempler, de les caresser, de les ranger. De les réparer aussi… Car cet excentrique s’est mis en tête que ses poupées ont, sinon une âme, du moins une sensibilité, qu’elles aspirent à vivre, qu’elles vivent, même, sous son regard et de son amour… Plus rien d’autre ni personne n’a d’importance à ses yeux, et certainement pas cette femme, Yane, actrice rencontrée un soir à l’opéra et qui l’importune, depuis, de ses assiduités. Elle est belle, pourtant, Yane, à faire tourner les têtes…. Comme la douceur et l’humilité n’ont pas l’effet escompté, elle passe à la vitesse supérieure et se dévêt devant lui, qui n’a d’yeux que pour une poupée, nue elle aussi. Alors, « humiliée, vaincue », prise à son tour de folie, une folie homicide, voilà qu’elle met en pièces le peuple des poupées sous les yeux effarés de leur roi, étrangement inerte… Prise de pitié et de remords, Yane prend alors pour le consoler l’apparence d’une poupée, ou d’un automate, le rôle d’Olympia des Contes d’Hoffmann d’Offenbach dans lequel Menzel l’avait vue la première fois, à l’opéra. » Résumé par Laurent Martin [5]
Affiche pour le fim « L’Homme aux poupées »,
Rodolphe Berény, 1909
Voici le stade final de cette transformation. A noter que, malgré le mode d’emploi détaillé (Haut-Bas-Fragile), l’opulence de la Femme Début de Siècle rend problématique sa chosification, à laquelle se prêtait mieux l’exsangue Femme Fin de Siècle.
Illustration pour « L’homme aux poupées »
Jean Veber, 1899
Cette précoce apparition du thème de la femme-objet flirte avec le fétichisme masturbatoire, mais relève également du fétichisme au sens religieux, selon l’analyse passionnante de Laurent Martin :
« La poupée, a fortiori l’automate en laquelle Yane doit se muer pour attirer l’attention de Menzel, est un être ambigu, matière inerte modelée à la semblance de l’humain, double sublimé du corps organique, qui participe de la matière et de l’esprit, à mi-distance de l’animé et de l’inanimé, mais aussi du profane et du sacré, à la fois jouet et idole. » [5]
Femme et mannequin
Jacques Villon, 1899, Moma, New York
La dame survêtue, avec ses gants, son chapeau et son grand noeud papillon qui ne laisse voir de sa peau que le visage, a passé son renard au cou du mannequin et laissé tomber à ses pieds son manchon.
En habillant le mannequin nu de ces accessoires, elle s’amuse à le tirer vers l’humain tout en lui rappelant que, tout comme la fourrure n’est qu’un résidu d’animal, lui aussi n’est qu’un objet dérivé.
Le modèle sur la table
Carl Larsson, 1906
Modèle écrivant des cartes postales
Carl Larsson, 1906
Le modèle est la jeune Leontine Lindström, qui figure dans nombre d’oeuvres de cette époque [6], et faisait partie de la maisonnée.
Les deux images ont manifestement été conçues pour former des pendants : vue frontale, harmonie rouge et vert, modèle assis posant un pied près du tabouret dans l’un, de la poubelle dans l’autre. Mais la composition va bien au delà d’un simple jeu formel, et raconte une sorte d’histoire.
Dans la première image, la jeune fille est tournée vers l’intérieur de la maison, vers le poêle, et manipule rêveusement une petite fleur.
Il faut lire l’image de droite à gauche, en trois parties, scandées par les feuilles accrochées au mur.
Au dessus des deux mannequins « morts« , obscènement empilés l’un sur l’autre, le dessin leur montre ce qu’ils ne feront jamais : l’amour.
Derrière la jeune modèle, la feuille blanche illustre ce qu’elle n’a pas encore fait (le don de sa petite fleur).
A gauche, sur la troisième feuille, un homme nu se prosterne devant elle (ou tente de lui prendre sa fleur). Comme Larsson a tenu à signer ce dessin dans le dessin, il n’est pas interdit de penser que cet admirateur, au dessus du poêle aux charbons ardents, exprime son propre sentiment : une attirance impossible à satisfaire.
Pas plus le dessin que le peintre ne peuvent rejoindre le modèle.
Dans la seconde image, la jeune fille est tournée vers le jardin, devant un grand bouquet de fleurs épanouies. Elle laisse derrière elle les mannequins, confinés dans leur ambiance malsaine, et écrit sur une table surchargée de feuilles, comme autant d’amoureuses possibilités.
Anna Stina Alkman (épouse de Edvard Alkman, éditeur et critique d’art)
Larsson, 1905, Collection privée
Au dessus d’elle, en contrepoint face à un même vase de fleur, le portrait de ce qu’elle va bientôt devenir : une femme établie.
L’atelier (The shop)
George W Lambert, 1909, Art Gallery of New South Wales
Peint dans l’atelier londonien de Lambert, le tableau montre, de gauche à droite :
- un modèle debout, ressemblant au roi Edouard VII (dont Lambert venait de faire le portrait)
- un mannequin assis ,
- un jeune garçon,
- Lambert debout, en pendant au premier modèle.
Les moyens de l’Art
Voici comment un confrère décrit la composition :
« Dans « Shop », l’artiste a disposé les ingrédients de sa profession : le sujet du portrait – le major general moderne, la figure couchée (de première importance pour la maîtrise des drapés) ; et, finalement, le peintre lui-même avec sa complexion pâle et ses longs cheveaux d’ambre roux. » Norman Lindsay, 1919 [7]
Mais cette explication fait l’impasse sur la présence du jeune garçon.
Une fausse famille
Et si ces trois personnages représentaient, assiégeant le peintre par derrière, les trois sujets qu’on demande sans cesse à un portraitiste célèbre ? L’homme costumé (ce faux roi), la femme déshabillée (ce vieux mannequin) et l’enfant qui rêve : seul ce dernier sauvant par sa candeur cette caricature de famille.
Le verre et la coupe de fleurs au premier plan, transposant l’huile et la palette, rajoutent une touche d’humour à cet autoportrait critique.
Le modèle et le mannequin
Wojciech Weiss
Wojciech Weiss, 1926
Wojciech Weiss,1934
En 1926, la modèle nue regarde avec curiosité son contraire et néanmoins confrère : un mannequin mâle, habillé jusqu’au cou, et qui la regarde avec une égale curiosité.
En 1934, le duo est devenu un trio. Dans un bric-à-brac d’artiste, la modèle bien en chair se repose le regard vague en mangeant des cerises. En face d’elle, le mannequin bellâtre la contemple, on comprend bien qu’il ne serait pas de bois s’il n’était pas de bois. Entre les deux, le Cupidon doré brandit sa flèche et ironise sur cet amour platonique.
Le repos (Reposing I)
Alan Beeton,1929, Beeton Family Estate
Le repos (Reposing II)
Alan Beeton,1930, The Fitzwilliam Miseum
Deux des sept portraits que Beeton fit de son mannequin : en 1929, elle relève sa robe en contemplant des images légères ; en 1930 elle se fait plus discrète, cachée derrière un rideau [8].
Danse de poupées
Vers 1940
Dans ce numéro burlesque de danse en miroir, Rene la girl doit suivre les mouvements d’Arlette la marionnette, bien sûr sans la regarder. On se demande ce qui est le plus apprécié dans ce spectacle : la perfection de la coordination, la plastique de la chair exaltée par celle du bois, ou bien le vieux fantasme de plier à sa volonté une Géante, par la seule force de la pensée.
http://www.metmuseum.org/art/metpublications/the_pictures_within_degass_pictures_the_metropolitan_museum_journal_v_1_1968 [2] « Trübner: des Meisters Gemälde » https://archive.org/stream/trbnerdesmeist00beriuoft/trbnerdesmeist00beriuoft_djvu.txt
http://www.fitzmuseum.cam.ac.uk/sites/default/files/Silent_Partners_Immunity1.pdf [3] George Lafenestre, La Peinture aux Salons de 1896, Revue des Deux Mondes, 4e période, tome 135, 1896, https://fr.wikisource.org/wiki/La_Peinture_aux_Salons_de_1896 [4] Pour l’ensemble des illustrations de l’Homme aux Poupées, voir https://jeanveber.com/2014/09/22/lillustrateur/ [5] L’Homme aux poupées par Laurent Martin https://www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2015-1-page-209.htm#no3 [6] D’autres appartitions de Leontine : http://kykolnik.dreamwidth.org/2075303.html?thread=20107687 [7] « In ‘shop’ the artist has arranged the elements of his profession: the portrait subject – the modern Major General … the lay figure (first aid to the mastery of drapery); and, lastly, the painter himself, with his pale complexion anf long amber-red hair … » Norman Lindsay 1919, cité par Timaru Herald, Volume XCVIII, Issue 170320, 9 October 1920, Page 5 [8] Beeton commença par une série de quatre : Composing et Decomposing, complétée par Posing et Reposing. Vu le succès, il fit une seconde série de trois: Posing , Reposing (Fitzwilliam Museum) et Composing. G M T
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