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Rencontre avec Combo le (street) Culture Kidnapper après son passage à l’IMA

Publié le 18 mars 2016 par Darkplanneur @darkplanneur

Combo est né en 1987, à Amiens et commence le graffiti en 2003 dans le sud de la France. En 2010, après des études à l’école des Beaux-Arts de la Villa Arson, il déménage à Paris et travaille en tant que directeur artistique pour des marques comme Peugeot ou Canal +. En 2012, à la date anniversaire de l’accident de la centrale de Fukushima, Combo s’introduit dans la zone interdite de Tchernobyl pour y coller des affiches publicitaires de grands groupes d’énergie nucléaire. Attaqué et  voire agressé physiquement pour son art qui interroge et prône la tolérance (un comble), Combo a été invité par Jack Lang à travailler à l’Institut du Monde Arabe où s’est terminée récemment sa première exposition personnelle. L’occasion pour Darkplanneur de faire un état des lieux sur le street-art, de parler de son futur, et de l’évolution de cet art qui est né dans la rue et de ceux qui le font.
combo2Araso : Combo, tu viens de terminer ta première exposition personnelle à l’Institut du Monde Arabe, CoeXisT, dont le décrochage a eu lieu dimanche. Quel effet cela te fait d’être « entré au musée » ?

Combo : Ca a été très intéressant de rentrer à l’IMA, cela m’a amené à travailler pour un public différent, qui n’est plus celui de la rue. Je m’y préparai depuis août. Je pense qu’il ne faut pas essayer de faire le même travail que dans la rue lorsque l’on est au musée. En dehors de ça, j’ai été ému que des gens paient pour voir mon travail.

Araso : lors du vernissage puis a posteriori, sur les réseaux sociaux, il y a eu un certain nombre de débats sur l’accrochage, qui reprenait la configuration de la rue…
Combo : J’ai réalisé moi-même la scénographie. Ce que le public n’a peut-être pas perçu, est le parti pris de faire des accrochages différents pour raconter différentes histoires : un espace était consacré au néo-classicisme passé pour rompre avec l’idée reçue du « c’était mieux avant » ; la salle était dédiée à Dji-art, le temps présent, pour casser les « on-dit » médiatiques. Enfin, l’espace aux colonne abritait les clichés. L’exposition comportait aussi plusieurs media, il y avait les peintures avec une technique plutôt classique, qui faisaient l’objet d’un accrochage type muséal. Il y avait aussi les affiches, entre peinture et collage, et les photographies. Il est vrai que les affiches, qui sont issues de la rue, étaient effectivement disposées sur des palettes similaires à celles que l’on récupère dans la rue. Mais c’était une partie de l’expo seulement.

Araso : L’exposition comportait, dans la salle aux pylônes, une série très troublante de portraits à visiter éclairée à la lanterne…
Combo : En effet. La dernière série, les clichés, est sur 100 portraits, 100% de différence : mon objectif était de montrer que cette différence, qui est inhérente à chacun de nous, est aussi ce qui nous unit. Pour la réaliser, j’ai demandé aux gens sur les réseaux sociaux de se proposer. Ils sont venus spontanément. J’ai eu des hommes, des femmes, des jeunes, des vieux, des chinois, des maghrébins. Ce sont eux qui ont rejoint le projet, je n’ai pas fait d’audition ou de casting.

Araso : Il me semble que tu fais un usage assez étendu des réseaux sociaux.

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Combo : J’utilise les réseaux sociaux pour faire de la promotion comme tout le monde, mais aussi à des fins participatives. Je suis un « crowd artist ». J’ai notamment fait appel au public via les réseaux pour choisir une partie des photographies qui composent le livre de l’exposition CoeXisT.

Araso : Est-ce que tu vis de ton art ?
Combo : Oui, aujourd’hui, c’est mon travail.

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Araso : Peux-tu nous dévoiler tes prochains projets ?
Combo : Je pars monter une exposition avec d’autre artistes à la maison de l’immigration. Nous allons peindre des fresques sur des affiches à caractères racistes dans le cadre de la semaine de l’éducation sur le racisme du 21 au 27 mars.  Je sors aussi mon livre, CoExisT et l’exposition doit voyager dans d’autres villes en France.  

Araso : Tu es entré au musée, tu t’institutionnalises on peut commencer à le penser, n’as-tu pas peur que cela dénature ton propos ?
Combo : C’est un vieux débat que celui du street art qui doit être obligatoirement dans la rue. Si notre art est éphémère ce n’est pas par choix, c’est parce qu’au bout d’un moment il est détruit ou effacé. Ce statut n’est pas contradictoire, il est juste synonyme d’un double travail : dans la rue et au musée.

Araso : Le street art s’est globalement bien installé, dans les galeries, sur le second marché et même au musée. Quelle est la prochaine forme d’art « rebelle », qui ira plus loin ? C’est quoi l’après street art ?

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Combo : On est déjà dans l’après street art. Basquiat, Keith Haring ont commencé dans la rue et ont très vite été en galeries. J’ai 29 ans, cela signifie que malheureusement, je vieillis, je vais de moins en moins vite et fais donc des choses de moins en moins dangereuses. Car quand on travaille dans la rue, c’est bête à dire mais il faut pouvoir courir vite !

Araso : Que faut-il pour être un bon street artist, à part une bonne paire de baskets ?

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Combo : Il faut avoir de l’intelligence pour comprendre comment parler aux gens. Il ne s’agit pas de se contenter de livrer une vision du monde, il faut aussi comprendre comment le public le voit. Et ça c’est valable pour tout le monde, pas seulement dans le street art. Après je dirais qu’il faut un peu d’intelligence et beaucoup de courage.


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