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Moi président

Publié le 07 mai 2014 par Malesherbes

Au lendemain du débat du 2 avril 2012, des journalistes et des politiques semblaient avoir découvert une figure de style, l’anaphore, et ironisaient sur l’emploi  que François Hollande en avait fait dans sa tirade « Moi président ». Pour ma part, c’est dès mes études secondaires que j’avais découvert ce trait de rhétorique, en commentant l’imprécation adressée par Camille à son frère Horace dans la tragédie homonyme de Corneille :

Rome, l'unique objet de mon ressentiment !

Rome, à qui vient ton bras d'immoler mon amant !

Rome qui t'a vu naître, et que ton cœur adore !

Rome enfin que je hais parce qu'elle t'honore !

Les réactions parfois peu aimables des médias m’ont rappelé la péroraison d’un discours prononcé par Nicolas Sarkozy pendant la campagne présidentielle de 2007. J’avais alors été frappé par la force de l’anaphore qui la constituait. Je me suis donc reporté à ce discours tenu le 10 avril 2007 à Orléans, que vous pouvez apprécier ici. Contrairement à mon souvenir, ce discours ne faisait pas que s’achever sur une anaphore mais, bien plus, était constitué par un déluge de ces figures. C’est miracle si, de loin en loin, on trouvait quelques phrases à l’état libre mais, elles aussi, souvent ponctuées de répétitions. Pour vous en convaincre, je joins en annexe un billet intitulé « Pléthore d’anaphores » qui liste les entrées de toutes ces figures de style.

Ceux qui se sont gaussés du « Moi président » et ceux qui brocardent maintenant le « J’assume » de Manuel Valls sont, dans le meilleur des cas, trop pressés ou trop paresseux pour prendre la peine de se référer à d’autres discours et, dans d’autres cas, incapables de préserver dans leurs commentaires un soupçon d’objectivité. Un peu comme tous ceux qui, voulant crucifier Ségolène Royal pour un mot malheureux prononcé il y a sept ans, s’obstinent encore à agrémenter le moindre substantif d’un préfixe « itude ». Qu’attendent-ils donc pour réserver le même sort aux trouvailles du candidat puis président Sarkozy : héritation, trentagénaire, fatitude, conquérance, perein ?


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