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Où sont les vulgarisatrices ?

Publié le 16 avril 2014 par Loreline123

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Il est d’usage de souligner la trop faible part des femmes en sciences, surtout lorsqu’on s’élève dans la hiérarchie. Mais encore plus rares sont les femmes scientifiques qui parlent de science dans les médias. Les vulgarisatrices sont invisibles ! Où sont les Hubert Reeves ou Jean-Claude Ameisen au féminin ? La page de Wikipedia sur la vulgarisation ne mentionne qu’une femme parmi 20 noms, et encore s’agit-il d’une vulgarisatrice anglaise née au 18ème siècle !

Quelles sont les raisons de cette sous-représentation ? Tout d’abord, les femmes investissent peu la vulgarisation. Elles craignent d’y perdre une crédibilité durement acquise. En effet, les femmes sont considérées comme moins crédibles en sciences que les hommes, comme l’a montré une étude de l’Académie des sciences américaines. Dans cette étude, 127 professeurs en sciences ont reçu des candidatures d’hommes et de femmes, et devaient indiquer s’ils souhaitaient les recruter, et pour quel salaire. Le résultat est saisissant : tous considèrent que les hommes sont plus compétents. Ces derniers se voient donc proposer plus souvent des postes, à des salaires plus élevés. En fait, les CV étaient fictifs et identiques, seul le sexe prénom changeait, soit féminin soit masculin. Ce biais en faveur des hommes existe même lorsque ce sont des professeurs de sexe féminin qui jugent les CV.

En quoi ce biais joue-t-il sur le fait de vulgariser ? Nous avons vu que les femmes sont « par nature » considérées comme moins compétentes. Or, il existe un préjugé tenace sur les vulgarisateurs, qui voudrait que seuls les mauvais scientifiques, ou du moins ceux qui ne sont plus capables de faire de la bonne recherche, se mettraient à vulgariser. Les femmes ne veulent donc pas cumuler un double handicap de crédibilité, en tant que femmes d’abord, en tant que vulgarisatrices ensuite !

Autre raison : la vulgarisation n’est pas encouragée par les institutions de recherche. Elle compte peu pour les promotions. Dans certains cas, elle constitue même une entrave. La plupart des scientifiques vulgarisent donc en dehors de leurs heures de travail, comme si cela ne faisait pas partie de leurs missions de chercheurs. Mais les femmes scientifiques, comme les autres femmes, consacrent davantage de temps aux tâches ménagères et aux soins des enfants que leurs homologues masculins. Elles ont donc moins le temps rédiger un livre de vulgarisation, participer à un bar des sciences, répondre à un journaliste ou aller dans les classes.

Dernière raison, et non des moindres : les médias invitent plus facilement des hommes que des femmes en tant qu’experts. Comme l’a souligné le collectif « prenons la une » qui milite notamment pour une juste représentation des femmes dans les médias, « dans les émissions de débat et les colonnes des journaux, les femmes ne représentent que 18 % des experts invités. » Encore une fois, un homme est « naturellement » considéré comme plus compétent qu’une femme.

Pour toutes ces raisons, les vulgarisatrices connues sont rares. Pourtant, elles existent ! L’astronaute Claudie Haigneré, la neurobiologiste Catherine Vidal, la climatologue Valérie Masson-Delmotte, ou la physicienne et philosophe Françoise Balibar ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Alors mesdames, après avoir investi les labos, introduisez-vous dans les médias. La blouse et le micro vont bien ensemble !  

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