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Italie, province de Verone : Le tourisme est une occasion, les loups doivent rester

Par Baudouindementen @BuvetteAlpages

Après une prédation ou un coup de colère d’éleveur, je lis régulièrement sur des blogs à tendance ruralo-pastorale des affirmations du genre « Après cela les intégristes de l'environnement nous diront-ils encore que tout va bien en Italie», en Espagne ou ailleurs, histoire de nier « l’exception française ».

Un exemple avec cet article publié sur larena.it : “La Provincia chiede di spostare i lupi”, la province demande de déplacer les loups.

L’article est repris en France à droite et à gauche, surtout à droite d'ailleurs, sur différents blogs pastoraux qui comparent la situation pastorale en France avec les situations en Italie ou en Espagne.  L'article en question est commenté assez grossièrement : La zone géographique en question, proche du lac de Garde, est appelée “Lessina” au lieu de “Lessinia”,  ; ils parlent de "conseil provincial", sans citer la province en question, la province de Vérone en Vénétie, 3.109 km2, soit les deux tiers de l'Ariège). C'est tout de suite moins impressionnant que ne le sous-entend le mot "province" pour un français. Les belges eux ne sont pas impressionés ; des petites provinces, ils en ont onze. 
En Italie comme en Belgique, le sens du mot province est proche de la définition française de "département". L'Italie en compte 110 sur un territoire grand comme 60 % de la France, qui compte moins de 100 départements.
L’article met en avant une motion proposée au président de la province de Vérone lui demandant de bouter le loup hors du secteur de la Lessinia, où se trouve le Parco naturale regionale della Lessinia  (Parc Naturel Régional de la Lessinia), qui occupe dix mille hectares du plateau d´altitude des Monts Lessini. Cherchez l'erreur...

Qu'en Italie un quarteron d'élus sous influence agricole tentant localement d'éradiquer le loup soient les quasi-riverains d'un lac portant le nom de « Lac de Garde », je trouve ça plutôt cocasse.
En Italie, les provinces exercent quatre compétences principales :

  • la planification locale et le zonage du territoire ;
  • la police locale et l'organisation des services de lutte contre les incendies ;
  • la réglementation des transports (enregistrement des véhicules à moteur) et la maintenance des routes secondaires ;
  • la police locale, appelée police provinciale (Polizia Provinciale).

La province de Vérone, comme les autres provinces, n'a donc pas compétence sur le thème des espèces protégées et de la biodiversité, qui concerne la région de Vénétie. A noter que légèrement plus au nord, frontalière, se trouve la région du Trentin-Haut Adige où se trouve le parc naturel d'Adamello-Brenta où ont été réimplantés des ours bruns il y a environ 15 ans.
Nous avons donc une petite assemblée locale (province de Vérone), où le lobby de l'élevage bovin a manifestement ses entrées, bien que le territoire soit largement urbanisé (295 hab/km²), qui se fend d'une motion juridiquement bancale pour faire plaisir à des électeurs potentiels sur un sujet sur lequel elle n'a pas compétence, et demande à son président de la soutenir, peut être devant l'assemblée de la région vénitienne, où la Ligue du Nord est puissante. Bref, une gesticulation polititienne déjà vue en France et ailleurs. Il y en a toujours eu, il y en aura toujours, notamment là où le loup n'avait plus mis les pieds depuis un bon moment.
Par contre, au vu de la réaction de la vice-présidente du parc naturel de La Lessinia, qui demandait "une médiation et une coordination des activités, en écoutant les exigences des éleveurs et en même temps en consultant les spécialistes des animaux sauvages" et précisait que "les réponses des experts nous confirment que le loup ne peut être exporté, ne peut être tué, mais qu’il faut le gérer en garantissant aux éleveurs des remboursements", il faudra que le parc national des Cévennes attendent un peu avant de se jumeler avec le parc naturel de la Lessinia.
A quand la motion anti-loups sanguinaires rédigée par le Conseil Supérieur des Communautés des Montagnes du Moriceau supérieur ?
La réponse n’a pas tardé dans le même journal, le 4 avril, on peut lire qu'il est "illusoire de transférer des loups parce qu'il en arriverait d'autres" et au sujet du tourisme il est dit ceci:

"Il y en a qui font de la présence du loup leur chance. Dans le parc national des Abruzzes, il y a deux millions de visiteurs à l’année pour l’ours marsicain et le loup : l’accès est réglementé parce qu’il y a trop de demandes et que les opérateurs touristiques et les gardes forestiers ne peuvent pas y faire face. Bref, c’est une fable que le loup éloignerait le tourisme parce que les gens en ont peur. Au point qu’il y a des coopératives qui organisent des trekkings même sur la neige, en raquettes ou en skis de fond, pour rencontrer les loups ou tout au moins pour écouter leurs hurlements la nuit : il y a de personnes spécialisées pour imiter ces appels, le « wolf-howling », littéralement hurlements de loups, une technique qui a vu le jour pour contrôler la présence des animaux et connaître l’existence des meutes. Les loups répondent, se font entendre, parfois s’approchent puis retournent sur leurs pas, indifférents. Dans les Asturies où vivent un millier de loups le tourisme et le pastoralisme sont intégrés autour du loup, alors que dans les Alpes françaises, dans le Parc du Mercantour, depuis des années l’Alpha Loup a vu le jour, une zone protégée avec un sentier qui entre dans le parc avec des points fixes pour l’observation des loups."

SondageLe tourisme est une occasion, les loups doivent rester

Anecdote : A côté de l’article original, se trouve un sondage : « La Provincia chiede di spostare i lupi dalla Lessinia. In Abruzzo sono invece «attrattori» di turismo. Che ne pensi? », soit  « la province demande de déplacer les loups de Lessinia. Dans les Abruzzes ils sont «attracteurs» du tourisme. Que pensez-vous? ». La réponse à 82 % est : « Sono un'occasione turistica, devono restare », « Le tourisme est une occasion, les loups doivent rester... ». Ce n'est qu'un sondage, mais c'est déjà un élément de réponse à une supposée ferveur anti-loup transalpine.

Oui, en Italie, cela se passe bien, mieux qu’en France, même s’il y a des extrémistes anti-nature, partout. Et la mise en avant des actes et des paroles de ces quelques extrémistes ne signifie pas "que tout va mal en Italie, comme en France"...

La Ligue du Nord (en italien, la Lega Nord per l'indipendenza della Padania, le plus souvent abrégée en Lega Nord, LN ; Ligue du Nord pour l'indépendance de la Padanie) est un parti politique italien régionaliste, fédéraliste, souvent décrit comme populiste, voire xénophobe.

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