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En finir avec Eddy Bellegueule d'Edouard Louis

Par Sylvie

FRANCE-PREMIER ROMAN

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Editions du Seuil, 2014

C'est le succès inattendu de la rentrée littéraire de cet hiver...Un premier roman d'un inconnu de 21 ans...best-seller, qui va être traduit dans de nombreux pays et adapté au cinéma par un réalisateur prestigieux.

N'étant au début pas du tout tentée par sa lecture;  je croyais encore à un roman "sensation" sur le rejet de l'homosexualité ; j'ai lu un article dans la presse sur le rejet du roman par sa famille et son village d'origine...et j'ai découvert un excellent roman social dans la lignée d'un Zola du 21e siècle ou plus modestement dans celle d'Annie Ernaux, elle aussi une "non héritière" issue d'un milieu très modeste.

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Rappelons l'histoire : s'appelant réellement Eddy Bellegueule (nom très répandu en Picardie), le narrateur auteur raconte l'histoire de ses origines dans un petit village de la Picardie profonde où la seule issue professionnelle semble être l'usine du coin. La découverte de son homosexualité précoce, son déni puis enfin son affirmation, sa fuite...voici l'itinéraire du récit.

Mais c'est surtout la description sociologique de sa famille et du village, criante de vérité, que nous retenons. Edouard Louis a fait sa thèse sur Pierre Bourdieu et ça se sent ! Il décrit magnifiquement les "habitus" d'une classe sociale donnée, son langage, ses habitudes culturelles, ses odeurs....Les expressions sont marquées en italiques, au style direct. Un milieu social rejetant la culture bourgeoise, qui dit que "le théâtre, c'est pour les tapettes". Au menu, la télé, la sempiternelle "roue de la fortune", les frites, les saouleries au bistrot du coin, les zonages à l'arrêt de bus. Ces habitudes qui font rejeter toute culture dominante. Le racisme ordinaire, la peur de l'autre, de l'arabe, du noir.

Ce milieu "périrural", où l'on "recrute" l'électorat lepéniste, est très peu traité en littérature. C'est là que réside le grand mérite d'Edouard Louis. ayant vécu cet ensemble de pratiques, il réussit à éviter tout misérabilisme ou sentionnalisme. Il choisit un ton neutre, des phrases courtes, des mots simples qui évacuent tout pathos.

Il y a bien sûr des scènes très dures, choquantes mais ne sombrant jamais dans le sensationnel. Car il y a cet aboutissement qui fera du petit déshérité un normalien.

Un très bon livre à découvrir.


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