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La Belle et la Bête (2014)

Publié le 05 mars 2014 par Olivier Walmacq

Un vieil homme ruiné se perdant dans la forêt se retrouve dans un château par un curieux hasard. En prenant une rose pour sa fille Belle, il déclenche la rage d'une bête lui demandant de devenir son prisonnier suite à cet affront. Pour ne pas perdre son père, sa fille décide de prendre sa place...

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Christophe Gans avait manqué dans le genre français depuis son adaptation de Silent Hill, sorti en 2005. En cause un grand nombre de projets évanouis comme Fantomas (il voulait un film type Iron Man, mais le producteur Thomas Langmann voulait revenir au trip De Funès), Le cavalier suédois (probablement trop cher et abandonné à l'origine pour que Gans puisse réaliser Fantomas) ou Lord of the apes (adaptation de Tarzan également produite par Langmann se basant sur le point de vue de Jane Porter, probablement avortée à cause de la trop grosse concurence avec le film de Constantin Film qui sort cette semaine et le projet Warner chapeauté par David Yates) et en sachant qu'il n'a jamais été impliqué dans un éventuel Silent Hill 2 (qui se fera sans lui pour notre plus grand malheur). Le fait qu'il ait accepté une nouvelle adaptation de La Belle et la Bête n'a donc rien d'étonnant, sentant probablement que quitte à prendre un projet plus grand public (mais néanmoins casse-gueule), il pourrait enfin tourner quelque chose. Les producteurs ont été le chercher pour qu'il adapte un conte français, le premier ayant été La belle au bois dormant, mais concurence oblige avec Disney (le film Maléfique avec Angelina Jolie) et au vue des projets parfois concurents ayant bousillé ceux de Gans, La Belle et la Bête était plus plausible.

La Belle et La Bête : Photo

Avec ce quatrième film (si l'on ne compte pas son sketch de Necronomicon), Gans joue gros avec un tournage en studio aux Studios Babelsberg et un budget de 30 millions d'euros. Indéniablement, il est difficile de dire que cette nouvelle adaptation est laide voire que les moyens ne sont pas devant l'écran. A la limite, certains trouveront le visuel kitsch voire grotesque en raison de certains costumes, situations ou même de l'ensemble graphique. Néanmoins, le budget est bel et bien présent, qui plus est on peut dire que le rendu visuel est peut être un des plus imposants du cinéma français récent, voire meilleur que sur Le pacte des loups qui avait une créature quand même bien misérable. Evidemment, le film de Gans n'est pas sans défaut mais c'est rare de voir un peu de féérie dans notre cinéma hexagonal et probablement la dernière fois, ce fut un gros désastre appelé Le petit poucet (pas aidé non plus par un réalisateur parmi les plus surestimé de notre cinéma). La Belle et la Bête symbolise également à lui tout seul toute l'ambition que n'a pu concrétisé Gans sur certains projets importants. On pense aussi bien à Rahan qu'à Omishua dont il épouse parfois l'ambition démesurée.

La Belle et La Bête : Photo Léa Seydoux

(attention spoilers) On le voit notamment dans un final grandiloquent avec des titans de pierre écrasant petit à petit les brigands menés par Eduardo Noriega. Cet élément est d'ailleurs assez péjoratif, Gans voulant se faire plaisir en faisant un peu n'importe quoi. Clairement les titans de pierre n'ont rien à faire là et même si le final n'en devient que plus spectaculaire , il n'en reste pas moins que nous sommes très loin de La Belle et la Bête dans cette séquence. D'ailleurs, le duel entre la Bête voulant protéger Belle et le méchant Noriega la menaçant de mort en est quelque peu décevant, du fait qu'il n'y a pas de réel affrontement. Les personnages se chauffent mais le duel est inégal. Noriega se fait casser la gueule et combat en traître en donnant un coup de couteau au bon endroit. Voilà le tour est réglé. Mais surtout, Noriega n'a pas de point d'attache avec Belle, vu qu'il n'a de sentiment pour personne (même pour sa maîtresse voyante) et certainement pas pour elle. Pour le coup, on privilégiera non seulement le film de Jean Cocteau (qui misait sur la rivalité entre les deux personnages joués ironiquement par Jean Marais) mais surtout le film produit par les studios Disney, dont le dernier acte tournait autour de cet affrontement entre beauté et laideur intérieures comme extérieures sous un orage foudroyant. (fin des spoilers) 

La Belle et La Bête : Photo Léa Seydoux

Dans l'aspect visuel, Gans s'est fait plaisir, faisant ressortir plus d'une fois les couleurs notamment par les robes de Belle soit d'un bleu sublime soit d'un rouge qui foudroirait le petit chaperon rouge. Niveau effets-spéciaux, le film en est bourré utilisant un grand lot de fonds verts pour ses décors souvent très beaux. On notera également une belle séquence de naufrage qui n'est pas sans rappeler la récente Reine des neiges (pure coincïdence bien évidemment). La Bête laisse quelque peu déçu également, notamment à cause d'une certaine inexpressivité laissant pantoi au vue des moyens alloués (elle est faites à la fois de maquillages et de performance capture). Certes qu'en mouvement, c'est plutôt correct d'autant que Vincent Cassel s'en sort plutôt bien dans le rôle ne cherchant pas à singer Jean Marais et heureusement. Il s'avère également convaincant dans les séquences de flashbacks rendant ainsi son personnage terriblement sympathique. Certains éléments font également tiquer le spectateur plusieurs fois. On pense dans un premier temps à la famille en elle-même avec des fils peu charismatiques et surtout les soeurs qui horripilent clairement. D'ailleurs, à la limite, ce n'est pas un mal qu'elles apparaissent peu tant elles ne servent à rien.

Autant dans le Cocteau, cela permettait de voir à quel point Belle est isolée, autant ici cela fait tâche, voire limite rajout comique pour combler le grand public. Le fait d'avoir engager Audrey Lamy et Sara Giraudeau n'est même pas étonnant, voulant jouer sur l'aspect populaire de ce film. Gans joue parfois trop parfois avec les ralentis comme il le faisait parfois trop sur Crying Freeman, ce qui est dommage car certains (mais pas tous) valent vraiment le coup. Mais le film a un beau lot de qualité déjà par son visuel mais aussi par son adaptation. Gans respecte au maximum la trame initiale sans prendre des libertés à tire larigot (à l'image du machin télévisuel diffusé sur W9). De plus, l'ensemble même s'il pati de quelques longueurs (notamment au début et le montage "film dans le film" franchement inutile) reste suffisament divertissant pour tenir devant les 1h50. Les domestiques deviennent ici des petites bêtes qui font penser aux petits acolytes de Totoro. L'influence d'Hayao Miyazaki se ressent beaucoup à plus d'un titre avec un Dieu de la forêt se vengeant comme dans Princesse Mononoké, les titans rappelent le robot du Château dans le ciel tout comme c'est le cas du royaume de la Bête ne pouvant passer que par un passage particulier. On retrouve également l'influence d'un classique comme La narcisse noire notamment avec les perspectives de profondeur. 

Un film aussi ambitieux qu'il n'est parfois lourd. Reste que c'est toujours plus potable que bons nombres de productions françaises actuelles.

Note: 12/20


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