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Le mouton Ardennais roux

Par Baudouindementen @BuvetteAlpages

Une race ovine rustique, stylée, facile à élever et gouteuse

 La race « Roux Ardennais » et « Ardennais tacheté »

Bélier roux ardennais Bélier roux ardennais L’Ardennais Roux (ou Tacheté) est un mouton "viandeux" robuste de taille moyenne. La tête est d’un roux uniforme (Ardennais Roux) ou tachetée de roux et de blanc (Ardennais Tacheté).

La race serait issue de la « race ardennaise » dont la première description date du 18ème siècle et qui était recherchée pour la qualité de sa viande. Au 19ème siècle, certains auteurs font la distinction entre deux types de moutons : avec (Ardennais Roux) ou sans tâches (Ardennais Tacheté) sur la tête. Il est probable que ces deux types ne forment que deux variétés présentes au sein d’une même population.
De la fin du 19ème jusqu’à la moitié du 20ème siècle, des moutons ardennais sont vendus pour être engraissés en Flandre, dans la région du Klein-Brabant. Dans cette région, quelques troupeaux ont été conservés et constitueraient la base de la population actuelle.
Tout comme pour les deux autres races ovines, la gestion des livres généalogiques a été reprise en 1998, les moutons étant inscrits soit dans le livre des Ardennais Roux, soit dans le livre des Ardennais Tachetés. Les enquêtes de terrain menées en 2009 ont permis de recenser 3.429 moutons au sein de 58 élevages. La structure génétique de la race a pu être mise en évidence à l’aide de la même méthode que pour les deux autres races ovines.
Trois groupes génétiques ont été identifiés sur base des données moléculaires, dont un comprend la majorité des individus inscrits dans le livre des Ardennais Tachetés, ce qui semble indiquer l’existence d’une réelle différentiation génétique entre les deux types d’animaux.
Le roux ardennais n’a pas subi la sélection des autres races qui sont élevées aujourd’hui.

Origine

Le mouton roux ardennais est considéré comme une race locale menacée et bénéficie d'un soutien de la Région wallonne et de l'Union Européenne. La race est éligible à la Mesure agro-environnementale 6 (MAE 6) pour les professionnels..., malheureusement pas pour les amateurs.
Le mouton ardennais peuplait les troupeaux du Sud de la Meuse, des Ardennes françaises (Race Solognote) et de l’Eiffel allemand (Coburger Fuchsschaf).
Au 19ème siècle, certains auteurs font la distinction entre deux types de moutons : avec (Ardennais Tacheté) ou sans tâches (Ardennais Roux) sur la tête. Il est probable que ces deux types ne forment que deux variétés présentes au sein d’une même population.
« Par excellence, ce « mouton Ardennais » fait partie intégrante de notre patrimoine vivant.
Un grand nombre de peintures et de textes fort anciens en sont les preuves irréfutables.
C’est probablement sur les tableaux du peintre belge Eugène-Joseph Verboeckhoven que nous le retrouvons le plus souvent. Ce peintre animalier vécut de 1799 à 1881 (ce n’était donc pas hier) et le représentait à cette époque exactement comme nous pouvons encore le voir aujourd’hui. »

Moutons (dont un brebis roux ardennais) dans leur bergerie (Eugène Verboeckhoven) "Moutons dans leur bergerie" par Eugène Verboeckhoven,
peintre belge né à Warneton le 9 juin 1798 et décédé à Schaerbeek le 19 janvier 1881.
De même, au cours des siècles, la littérature ancienne vantait déjà à l’étranger la qualité exceptionnelle de la viande du mouton roux ardennais. À ce sujet, Staf Van den Bergh, secrétaire du SLE (Steunpunt Levend Erfgoed), responsable du groupe de travail ovin au sein de cette association et lui-même éleveur d’ « Ardense Voskop », a fait un travail de bénédictin pour réunir une quantité invraisemblable de textes anciens. Grâce à ses recherches, je vous livre ce qu’en disait au 18ième siècle Dom Nicolas Spirlet (dernier seigneur-abbé de Saint Hubert) :
  • « Le roy de France aime extrêmement le mouton d’Ardenne » (lettre du 11/09/1765)
  • « Le mouton fait la richesse de l’Ardenne » (lettre du 14/06/1777)
  • « Mon cher Prieur, quand j’ai dit qu’on concerveroit le troupeau de Gemelle, ce n’est pas pour faire passer ici à Versailles les moutons en vie, mais pour les faire tuer à Bouillon et les envoier ici par la poste de Sedan pour le Service de la famille Roiale. Vous le direz à Dom Chrysostome d’en envoier 25 des meilleurs, en vie bien entendu, à Dom Basile à Bouillon qui recevra mes instructions pour les faire passer ici. Il enverra la même quantité à chaque quinzaine. Il peut compter qu’ils lui seront bien payés. Mais il faut avoir l’intention de lui envoier les meilleurs. Le Roy aime extrêmement le mouton d’Ardenne et si ceux que nous enverrons sont goutés, cela peut faire grand bien. » (lettre du 16/09/1765)

Et qu’ajouter de plus pour mettre en évidence la finesse de la viande que ce qu’en disait Julien Deby en 1848 dans son livre « Histoire Naturelle de la Belgique » :

« Nous indiquerons les races qui nous semblent avoir le plus de chances pour s’étendre et se propager en Belgique. Il y a d’abord nos excellents moutons des Ardennes, dont les restaurateurs de Paris vendent souvent la chair pour du chevreuil… »

Régression

La population de moutons roux ardennais a régressé au fur et à mesure de la plantation progressive d’épicéas, surtout au XIXe siècle. Il a disparu totalement de l’Ardenne fin des années 50. Quelques exemplaires ont heureusement été sauvegardés en Flandre, où ils portent le nom de « Ardense Voskop ».

Progression

Le mouton ardennais roux connaît un engouement remarquable. Bien que classée parmi les races qualifiées de « menacées », elle est actuellement à l’association wallonne des éleveurs d’ovins et caprins (AWEOC) la 2e en importance (après le Texel), tant au niveau de la taille du cheptel wallon inscrit au livre généalogique qu’au niveau du nombre d’éleveurs.
Rien qu’en Wallonie, presque une centaine d’éleveurs cotisants en détiennent environ 2.000 en pure race.
Outre la prime non négligeable pour les éleveurs professionnels (30 € par mouton et par an offerte par la Région Wallonne), sa rusticité et sa facilité d’élevage en font un mouton privilégié par l’amateur ou « l’éleveur trop occupé » qui ne néglige pas non plus son aspect esthétique.

Standard

Le mouton ardennais roux est un mouton beau et élégant. Ses pattes sont brunes et sa laine beige roussâtre. Les troupeaux sont de toute beauté et n’ont rien a voir avec un troupeau de Texels, moutons aux gigots monstrueux et aux yeux globuleux...
La tête du roux ardennais est fine, d’un roux uniforme au profil droit ou busqué. Les cornes sont autorisées chez les béliers mais interdites chez les brebis. les oreilles sont horizontales, pattachées plus haut que les yeux.
Pour le corps, le dos doit être bien droit, assez long. La queue doit être laineuse au moins jusqu’au niveau des jarrets. les gigots doivent être plats et allongés. Les aplombs des membres doivent être corrects, les onglons striés ou noirs.
Mensurations

  • Poids (70 kg pour les béliers, 55 kg pour les brebis)
  • Taille (70 cm pour les béliers, 66 cm pour les brebis)
  • Longueur idéale (77 cm pour les béliers, 73 cm pour les brebis).

La laine du mouton roux ardennais varie du roux clair au roux foncé, l’idéal étant un roux moyen, sa qualité est moyenne. On note la présence d’une jarre, une « barbiche » pouvant ressembler à une « crinière » chez les mâles de 3 ans et plus, ce qui leur donne un air viril impressionnant.

Rusticité

Le roux ardennais s’avère costaud, vif et agile et méfiant. C’est un mouton qu’il convient d’amadouer par des visites régulières avec un petit complément alimentaire (pain sec, céréales, granulés, fanes de légumes…) - il devient alors "plus" familier - si on veut éviter des courses poursuites effrénées lors des changements de parcelles, de la capture des agneaux, de la tonte annuelle ou de l’entretien des ongles. Soyez toujours gentil avec lui, le mouton roux ardennais est physionomiste et il a de la mémoire! Son caractère varie de calme à parfois "un peu" sauvage.
C’est une race rustique, qui ne craint pas la pluie ou la neige, même s’il se met à l’abris dès qu’il en a l’occasion en cas de fortes intempéries (un simple abri: un toit et une protection des vents dominants ou froids). Il est donc bien adapté aux conditions climatiques difficiles des Ardennes et est résistant aux maladies et aux parasites.
Le mouton roux ardennais est donc la race idéale à développer pour un élevage amateur familial orienté vers une autonomie alimentaire et la permaculture.

Alimentation

Peu exigeant en nourriture, il s’adapte aux terrains pauvres, peu productifs, aux fourrages de mauvaise qualité. le mouton ardennais roux apprécie les herbes mais aussi les orties, les ronces, les arbustes, les feuillages et les troncs des arbres fruitiers dans les vergers. Gare aux écorces tendres des jeunes arbres non protégés.
L’herbe étant toujours plus verte ailleurs, les agneaux roux ardennais n’hésitent pas à passer la tête dans les clotures aux maillage trop large pour brouter toutes les fleurs ou plantes décoratives (ou non) qui passent à leur portée de dent; et ce, malgré une clotûre électrique supplémentaire adaptée aux « toisons laineuses isolantes ». Personnellement, j'ai opté par endroit pour une clotûre en chataignier (écartement 7-8 cm). Les agneaux roux ardennais n'hésitent pas à se mettre debout sur le dos de leurs congénères pour accéder aux appétisants feuillages bas ! Avant d’inverser les rôles en remerciement du service rendu. Autant le savoir au moment de s’équiper...

Agnelage

Agneau roux ardennais Agneau roux ardennais Les brebis agnellent sans difficulté durant la période de janvier à avril (même en désaisonnement). L’agnelage ne nécessite pas de surveillance spéciale. Les agnelles mettent bas dès la première année et ne donnent généralement à cet âge qu’un seul agneau. Si on prend le temps de laisser grandir les agnelles roux ardennaises pour en faire des antenaises (brebis dans leur deuxième année), on obtient souvent des portées doubles tout comme pour les adultes. La prolificité moyenne est de 1,5. Les brebis agnèlent parfois 3 fois en 2 ans.
En février 2013, plusieurs brebis roux ardennais qui pouvaient rentrer et sortir de la bergerie de la Buvette librement ont mis bas dans plus de 20 cm de neige. Les agneaux étaient vite debout. Mais vu le froid glacial, je les ai vite rentré dans la bergerie. Les agneaux en bas âge peuvent aussi être la proie du renard. Mais il suffit de s'en protéger et de rentrer les agneaux pour la nuit les quinze premiers jours de leur vie, histoire qu’ils aient atteint une taille suffisante.
Les agneaux roux ardennais qui naissent « chocolat au lait » sont magnifiques. Les mères sont de bonnes brebis  laitières et offrent un taux de croissance très performant dans le premier mois de lactation.

Il convient de veiller à ce que les nouveaux nés têtent rapidement. Dans le cas contraîre, je les aide en mettant les agneaux au pis et en cas de besoin, je les « gave » immédiatement de lait (en poudre dilué) à la seringue (100 à 150 ml par jets de 5 à 10 ml) jusqu’à ce qu’ils aient la force de têter à nouveau leur mère. Mais cela ne m’est arrivé qu’une seule fois.

Ils deviennent très vite de beaux agneaux recherchés comme « agneaux de Pâques », ce que j’évite personnellement. Après 3 ou 4 mois, la laine des agneaux s'éclaircit progressivement et prend une teinte beige clair.

Outil de gestion

L’Ardennais roux, parce qu’il convient particulièrement bien à l’entretien et à la valorisation des terrains pauvres dont il s’accommode volontiers, est de plus en plus utilisé dans la gestion de réserves naturelles et de pelouses sèches. On les retrouve comme outil d’entretien des terrains difficiles (Citadelle de Namur) ou des camps militaires (projet LIFE NATURA 2Mil, avec 2Mil comme militaire).

Viande

Les agneaux atteignent un bon rendement en boucherie et donnent une viande maigre d’excellente qualité, d’un goût exceptionnel et au taux de graisse naturellement faible. Qui y goutte, y revient. Les éleveurs n’ont aucune difficulté à écouler leurs agneaux.
Un bon choix pour ceux qui, comme moi, refusent d'acheter de la viande des élevages qui ne cohabitent pas avec les prédateurs.
J’ai choisi cette race pour sa rusticité, pour le goût de sa viande et pour ne plus acheter d’agneaux issus d’éleveurs alpins ou pyrénéens qui refusent de cohabiter avec les grands prédateurs. Je pense particulièrement au mouton de « Barèges-Gavarnie », une A.O.P. qui a inscrit malhonnêtement dans sa charte « le libre paturage », sans soin, sans protection ni surveillance, qu’une visite « hebdomadaire » dans les estives situées en pays Toy, en zone à Ours, rendant ainsi tous les pasages de l’ours problématiques, la table étant "ouverte", et profitant des dégâts causés par cet abandon des moutons en montagne pour hurler « à l’ours », ameuter la presse et exiger au mieux « l’effarouchement », au pire « l’éradication » de cette espèce « protégée » et déclarer toute cohabitation « impossible », contrairement aux éleveurs qui eux cohabitent... sans problème.

Elever des roux ardennais

Pour ceux que cela intéresse, le site les « amis de la terre » publie des informations sur « Comment se lancer » dans l’élevage « amateur » et donne des recommandations et des  conseils qui vous éviteront bien des déboires :

  • Où acheter mes premiers moutons roux ardennais ?
  • Combien de moutons pour mon terrain ?
  • Comment alimenter mes moutons ?
  • Faut-il une bergerie ?
  • Quels soins apporter ?
  • La loi et les déclarations officielles
  • L’abattage
  • Devenir membre d’une association ?

Lire aussi

Sur le mouton roux ardennais

Sur la cohabitation
  • Pour un pastoralisme pyrénéen durable
  • Repères dans le paysage agricole français: Politique agricole et pastorale en zone de montagne par Gérard Bozzolo.
  • La ferme du Plantdemount
  • Le Broutard du pays de l’ours
  • Valorisation économique et ours

Sources

Agrinature, Schaens, UCLouvain, AHPSO, Les amis de la Terre


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