Gilbert Pastor
I
Ici, c'est au cours du songe que sont prises les décisions véritables. Ainsi de
ces figures comme teintes de la lumière des limbes et des tendresses perdues.
Elles semblent ne pas vouloir cesser d'apparaître, glyphes mêmes de la solitude
et du désir. Ces êtres consentent à l'irrémédiable, à un désarroi innomé et ils
sourient ou appellent de l'œil. Les tons sont délavés, il n'y a plus de temps
pour la souffrance et pourtant ces êtres veulent parler, nous parler comme
s'ils détenaient un secret. La sphère qu'ils occupent est sans adresse comme
l'irrévélable.
II
Une peinture qui est aussi ce qui reste d'un récit aujourd'hui disparu, né
parmi les fétiches, les reliquaires indéfinis, les emblèmes, les livres anciens
et les retables d'une petite demeure dont la configuration n'a pas d'autres
référents que les strates sans définition de ce qui est perdu.
L'atelier de Gilbert Pastor est en fait un Mutus Liber. Gilbert Pastor aurait
donc transcrit les notes du voyage interdit, celui où l'on pourrait citer la
mort de mémoire. Ainsi de ces scènes qui ne correspondent plus à un inconscient
mais à une dramaturgie constituante qui définirait plutôt un calcul caché, et
peut-être tragique : cette certitude que l'au-delà et ses ombres ne seraient
pas au-delà, mais simplement dans la pièce d'à côté. Gilbert Pastor a oublié
son secret parce qu'il a voulu le garder comme un tableau que l'on a détruit,
que l'on a maudit et qui était pourtant la clef de cet à-côté-absolu.
Christian Gabriel / le Guez Ricord
Lire cet
article d’Alain Paire sur Gilbert Pastor.
[choix d'Alain Paire]