Magazine Culture

Diane chasseresse à l'affût d'un chevreuil mal garé (Baudelaire - 1er jour)

Par Absolut'lit @absolute_lit

06 Pervenche tenue pantalon 1977.jpgCe n'est pas comme si elle n'était pas habituée, depuis le temps. Une routine, un pain quotidien (jamais de baguette, ni de croissant), un dommage collatéral selon la quinzaine du mois en cours.

Oh oui elle en avait entendu, des vertes et des pas mûres, elle en avait soupé, des douces, et des plutôt salées, des éclaboussures de sang-chaud, pendant qu'elle s'évertue à garder le sien froid.


Certains jours elle avait l'impression de mener la vie d'une femme d'affaires trop influente, ou haut-placée politique (« je sais où t'habites », « on t'retrouvera », « fais gaffe à tes gosses ») sans en avoir le train.

Pourtant nobles sont ses missions : veiller à la libre (et bonne) circulation des personnes dans la ville (Schengen urbain), lutter contre l'injustice (« non Madame votre 4x4 n'est pas un véhicule prioritaire »), remettre les égarés dans le droit chemin (« si vous voyez un panneau rouge avec un trait blanc dedans... »), faire entendre la voix des minorités (« et si monsieur veut passer avec son fauteuil roulant, on lui dit de revenir plus tard ? »)

Rien n'y fait. Elle sera toujours vue d'un mauvais oeil (qu'on lui jettera à l'occasion) et perçue plutôt comme une Diane Chasseresse à l'affût d'un chevreuil stationné trop près d'un peuplier, comme une nonne verbalisant le moindre péché.

Mais quand certains outrepassent les clichés couramment véhiculés, la « considérent » comme une dame qui se « dé-vertue » pour permettre à l'Etat de ne pas franchir le seuil de pauvreté – en témoigne cette lettre glissée sous un essuie-glaces :

Tu mettrais l'univers entier dans ta ruelle,
Femme impure ! L'ennui rend ton âme cruelle.
Pour exercer tes dents à ce jeu singulier,
Il te faut chaque jour un coeur au râtelier.
Tes yeux, illuminés ainsi que des boutiques
Et des ifs flamboyants dans les fêtes publiques,
Usent insolemment d'un pouvoir emprunté,
Sans connaître jamais la loi de leur beauté.

Machine aveugle et sourde, en cruautés féconde !
Salutaire instrument, buveur du sang du monde,
Comment n'as-tu pas honte et comment n'as-tu pas
Devant tous les miroirs vu pâlir tes appas ?
La grandeur de ce mal où tu te crois savante
Ne t'a donc jamais fait reculer d'épouvante,
Quand la nature, grande en ses desseins cachés,
De toi se sert, ô femme, ô reine des péchés,
- De toi, vil animal, - pour pétrir un génie ?
Ô fangeuse grandeur ! sublime ignominie !*

quand on calomnie à ce point son métier, là, Marie, elle voit-rie.. euh, rouge !


(* : Tu mettrais l'univers entier dans ta ruelle)


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Absolut'lit 804 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines