Les Moissons du Ciel

Genre : Drame

Année: 1978

Durée : 1H30

L’histoire : Après le meurtre accidentel d’un homme, Bill s’enfuit vers le Texas en compagnie de sa petite amie Abby et de sa petite sœur Linda. Ils parviennent à se faire engager pour faire les moissons d’un champ de blé de la propriété d’un richissime et jeune fermier. Ce dernier tombe amoureux d’Abby. Bill demande à Abby de céder aux avances du fermier, ce dernier, étant atteint d’une maladie, est promis à une mort certaine. Pour Bill c’est là l’occasion de s’emparer de l’héritage. Cependant le fermier connaît une soudaine amélioration de santé.  

La critique de Vince12 :

Attention Chef d’œuvre ! Les Moissons du Ciel réalisé par Terrence Malick en 1978. A l’époque le réalisateur n’en est qu’à son second essai. Il s’est fait remarquer en 1974 avec son subversif La Balade Sauvage, premier film et premier chef d’œuvre.

Malick se lance alors dans un nouveau projet, Les Moissons du Ciel dont il est également le scénariste. Le tournage débutera en 1976 et durera prés de deux ans. Le retard augmentera le budget initial de 800000 dollars. Le tournage ne fut pas des plus faciles en raison de conflits entre acteurs, réalisateur, producteurs et opérateurs. Pourtant Malick est parvenu à mettre au monde un pur chef d’œuvre.

Attention SPOILERS

En 1916, Bill ouvrier dans une fonderie s’enfuit après avoir accidentellement tué un homme. Il décide de partir vers le Texas en compagnie de sa petite amie Abby et de sa petite sœur Linda. Arrivés sur place, Bill et Abby se font passer pour frère et sœur afin d’éviter les questions indiscrètes.

Ils parviennent à décrocher un job dans la grande ferme d’un richissime propriétaire terrien. En effet c’est la saison des moissons et Bill, Abby et Linda s’attèlent au travail dans les gigantesques étendues de champs de blé. Le propriétaire de la ferme un jeune homme riche, commence à tomber amoureux d’Abby en pensant qu’elle est la sœur de Bill et non sa petite amie.

Un jour Bill surprend une conversation entre le fermier et son médecin. Ce dernier annonce au fermier que sa maladie prend du terrain et qu’il ne va probablement pas s’en sortir. Plus tard Bill apprend que le fermier fait des avances à Abby. Bien vite il met au point un plan. Il demande à Abby de céder aux avances du fermier, de l’épouser et d’attendre que ce dernier succombe à sa maladie. Il pense ainsi pouvoir tirer profit de l’héritage.

A la fin des moissons le fermier et Abby se marient. Cependant les choses ne se passent pas comme prévu. En effet la santé du fermier connaît une soudaine amélioration entravant ainsi les projets de Bill. Pire Abby commence à tomber vraiment amoureuse du fermier. Le plan de Bill est déjoué.

Voilà donc pour l’intrigue du film. Une fois encore Terrence Malick est à l’origine du scénario où s’entremêlent émotions, amours, jalousie, colère et fidélité. C’est l’histoire d’un chassé croisé amoureux, sur fond de peinture de l’agriculture du début du vingtième siècle.

Le scénario peut cependant paraître assez classique mais peu importe car chez Malick, L’histoire importe beaucoup moins que la façon dont elle est racontée. Et à nouveau le réalisateur montre un œil hyper affuté et un véritable génie visuel. Les images sont justes fantastiques, irréelles et envoûtantes. Il faut par ailleurs saluer le directeur de la photographie Néstor Almendros. Pour l’anecdote, il paraît que ce dernier était en train de perdre la vue au début du tournage. Il faisait alors prendre les photos par ses assistants puis les étudiait avec des verres épais de lunettes. Cela ne l’empêchera pas de réaliser un superbe travail et de recevoir l’oscar de la meilleure photographie.

Une fois encore les images sont somptueuses, certaines se rangent sans difficultés dans le top des plus belles de l’histoire du cinéma. La réalisation de Terrence Malick n’a jamais atteint de tels sommets. Comme à son habitude le réalisateur saisit chaque détail pour le transposer au premier plan. Autant dire que Les Moissons du Ciel est une expérience visuelle qui vous titille la rétine et vous étourdit littéralement. On pourrait citer les plans somptueux de paysage tourné à « l’heure bleue ». Ou encore la scène de l’attaque des sauterelles, qui reste l’une des plus impressionnantes et des plus hallucinantes jamais vue. Autant dire qu’en termes de technique visuelle, Malick se montre en avance sur son temps.

Almendros disait de Malick qu’il voulait un film dans lequel « l’intrigue est racontée visuellement ». Pari totalement réussi. D’ailleurs chaque nouvelle vision offre un élément nouveau au spectateur.  

Outre sa beauté visuelle et contemplative, le film peut également s’appuyer sur un bon casting. Pour information il paraît que Malick voulait Travolta pour le rôle de Bill. Ce dernier n’étant pas disponible, Malick choisira Richard Gere qui rêvait depuis longtemps de travailler avec le cinéaste. Par ailleurs l’acteur livre une performance remarquable et tient ce qui est sans aucun doute, le plus beau rôle de sa vie.    

On retrouve également Brooke Adams parfaite dans le rôle d’Abby et Sam Sheppard absolument remarquable dans celui du fermier.  Sans parler de l’interprétation de la très jeune Linda Manz dans le rôle de Linda. La jeune fille est également la narratrice de l’histoire. A l’instar de La Balade Sauvage, la voix off féminine, douce et naïve, est en décalage avec l’histoire racontée, ce qui contribue à donner cet effet si particulier.

On peut également parler de la musique qui est le fruit du travail d’Ennio Morricone, Leo Kottke et Doug Kershaw. Mais on en retient surtout la célèbre partition « Aquarium » de Camille Saint-Saëns qui mélangée aux images contribue grandement à l’ambiance étrange et envoûtante du film.

Les Moissons du Ciel est donc un film puissant sur l’amour, la jalousie, la trahison, la fidélité mais également une peinture de la société agricole du début du siècle. Par ailleurs, comme l’ont souligné des critiques, le film prend à contrepied le mythe des Raisins de la Colère. Il en est en quelque sorte l’antithèse. L’ouvrier agricole étant ici prêt à tout pour améliorer sa situation.

Les Moissons du Ciel, était seulement le second film de Terrence Malick et c’est une réussite comme on en voit peu. Ce film est une expérience unique d’une beauté saisissante. Le chef d’œuvre absolu de Terrence Malick ! 

Note : 19/20