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« Lettre à la gynéco qui n’a pas sauvé ma libido », par une patiente déçue

Publié le 04 novembre 2012 par Latchipie @Tchiiipleblog

Voici un article de Gaelle-Marie Zimmermann à lire, à relire, à partager !

« Lettre à la gynéco qui n’a pas sauvé ma libido », par une patiente déçue

Aujourd’hui, j’ai reçu ce mail d’Emilie :

Bonjour,

Je viens d’envoyer à la première gynécologue que j’ai consultée un courrier lui expliquant comment elle, et ses confrères, m’avaient privée de 10 années de vie sexuelle épanouie.

Bien sûr, il est de notoriété publique que la pilule peut avoir des conséquences sur la libido ; sauf que moi, qui sais lire et écrire et dispose d’une connexion internet, j’ai mis 10 ans à comprendre que mon problème venait de là. Et que lorsque j’en parle autour de moi, je vois des yeux qui s’ouvrent grand : ceux des filles qui ont commencé très jeunes la pilule et ne l’ont jamais arrêtée, ou ceux de leurs copains qui se disent que, peut-être, oui, ça pourrait être à cause de ça… Je ne sais pas si la publication de cette lettre ouverte fait partie des choses envisageables sur ZZG. Mais je pense qu’elle pourrait aider d’autres laissés-pour-compte de la pilule.

Je suis d’accord avec Emilie. C’est donc avec plaisir que je publie ici sa lettre.

« Madame,

Je suis venue vous voir en consultation il y a bien longtemps, en 1996-97 environ. A l’époque, j’avais 17 ans, de l’acné, et pas encore de vie sexuelle. Je n’en étais toutefois pas très loin, et je crois me souvenir que j’avais déjà rencontré, à ce moment-là, le garçon qui est devenu mon mari.

J’avais confiance en vous, vous étiez la gynéco de ma mère, et c’est sans doute sur ses conseils que j’étais venue vous voir. Pour traiter mon acné, et surtout pour une première visite, un peu initiatique, celle qui donne l’impression qu’on commence à être une femme.

Vous m’avez alors proposé – en tous cas, prescrit – une pilule contraceptive efficace sur l’acné : Diane 35. Je suis ressortie de votre cabinet avec une ordonnance, me sentant sans doute doublement féminine : une pilule ET une prise de sang tous les ans pour contrôler mon cholestérol, je jouais dans la cour des grandes.

J’ai continué à prendre Diane pendant plusieurs années, puis j’ai opté pour une pilule moins dosée, jusqu’à arrêter lorsque j’ai voulu avoir mon premier enfant.

Entre temps, j’avais changé de ville, donc de gynécologue, plusieurs fois.

Ma première grossesse est arrivée très vite (4-5 semaines) après l’arrêt de la pilule, mais après l’accouchement je n’avais plus envie de reprendre de comprimé. Après en avoir discuté avec mon gynécologue d’alors, j’ai choisi de mettre un implant progestatif, environ 1 mois ½ après la naissance du bébé. Cette première période sans contraception a donc été courte, et chamboulée à tous points de vue (essais de conception – grossesse – post-partum). J’ai gardé l’implant environ 2 ans, jusqu’à le faire enlever pour essayer de concevoir un deuxième bébé.

Cette fois-ci, j’ai attendu environ 4 mois avant d’être enceinte. 4 mois de plénitude sexuelle ; j’ai attribué cette libido réjouissante à mon envie d’être enceinte. Pour mon mari et pour moi, c’était une vraie découverte. Pendant plus de 10 ans, j’avais été celle qui n’avait presque jamais envie de faire l’amour, celle qui était sûrement un peu frigide, celle que la sexualité n’intéressait pas trop. Nous avons passé des soirées entières à décortiquer son désir à lui, et mon absence de désir à moi. Et il a fallu s’aimer vraiment fort, pour continuer quand même, pour s’habituer à ce déséquilibre, pour ne pas se blesser l’un l’autre.

Là, brusquement, j’avais autant envie de faire l’amour que lui. C’était comme de recevoir un décodeur Canal + après avoir passé 10 ans à regarder des films cryptés.

Sauf qu’après la grossesse, ma gynécologue n’a pas voulu me reposer d’implant avant le retour de couches. Lequel est arrivé au bout de 10 mois environ. Qui furent, évidemment, 10 mois de plénitude sexuelle, abstraction faite de la contrainte liée à l’utilisation de préservatifs. Au bout de 10 mois, donc, nouvel implant et soupir de soulagement : nous allions enfin abandonner les préservatifs. Sauf que 2 jours après la pose, ma libido était revenue à la case « Waterloo, morne plaine ».

Evidemment, cette fois j’ai immédiatement fait le rapprochement, et je me suis fait enlever ce satané implant aussi vite que possible. Depuis, ma libido est aussi riche, réjouissante et parfois surprenante que ce qu’elle aurait dû être depuis mes 17 ans.

Mais Madame, je garde contre vous une rancune énorme. Contre vous, et contre les gynécologues que j’ai croisés ensuite, et qui m’ont enlevé 10 ans de vie sexuelle épanouie.

Avez-vous fait votre travail, en n’évoquant jamais, avec la jeune fille que j’étais, la possibilité qu’une contraception hormonale diminue ma libido ? Si ça peut vous rassurer sur votre professionnalisme, aucun autre gynéco ne l’a fait après vous. Quand il m’est arrivé de poser la question – au moment où j’ai décidé de troquer ma pilule contre un implant – votre confrère parisien m’a dit : « Oui, la pilule peut avoir un effet sur la libido, mais parfois elle la diminue et parfois elle l’accentue ». Comme je ne lui ai pas dit : « Mais alors moi, je suis frigide, ou c’est la pilule ? », je suis ressortie de chez lui bien avancée, sans savoir ce qu’il en était pour moi.

Combien de filles dans mon genre ont cru, et croient encore, que la sexualité n’est pas faite pour elles, juste parce qu’elles n’ont connu qu’une sexualité « sous hormones » ?

Combien d’hommes ont cru, et croient encore, qu’ils ne seront pas désirés par la femme qui est dans leur lit, et culpabilisent en pensant qu’ils sont des obsédés sexuels ?

Combien de filles et de femmes n’osent simplement pas parler de leurs difficultés sexuelles à un médecin ou à leur entourage, parce que c’est gênant, et parce que la conclusion de l’échange risque de les renvoyer à quelque chose comme : « décidément, oui, c’est moi qui dois avoir un problème » ?

Combien de couples déchirés ? (lire article intégral)

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