Marrakech, Tanger, Casablanca, Essaouira, Ouarzazate. Ces cinq noms sont le visage cinématographique du Maroc dans la
production étrangère (américaine et française principalement). Si certaines de ces villes bénéficient d’une grande publicité comme Marrakech, la renaissance d’autres est intimement liée à
l’émergence de l’industrie cinématographique. C’est le cas d’Essaouira immortalisée par Orson Welles dans les années 50 et, plus récemment, de Ouarzazate. Ya-t-il une recette à suivre pour les
petites villes qui veulent se faire une place sous les projecteurs ?
Sans avoir connu le succès de Ouarzazate qui possède
désormais ses studios, une petite ville comme Essaouira, à 150 km de Safi, a connu une publicité intimement liée au septième art. Récemment transformée
en Jérusalem par Ridley Scott dans Kingdom of Heaven, Essaouira a été une des
premières villes cinématographiques du Maroc. Elle fut en effet l’écrin d’Othello, la Palme d’Or marocaine signée Orson
Welles en 1952. L’attachement du réalisateur au Maroc et à la ville des vents a donné à celle-ci une image éminemment culturelle et branchée qui lui est restée plus de 50 ans plus
tard. Le grand Wells avait pourtant tourné dans d’autres lieux qui furent par la suite partiellement oubliés. Il en va ainsi d’El Jadida et de sa citerne portugaise et de Safi et son château de mer. Si la fameuse citerne de Mazagan est aujourd’hui encore utilisée dans de
nombreux clips et publicités, le château safiot a par contre sombré dans l’oubli. Pire, menacé par la force des marées atlantiques, il risque même tout bonnement de tomber à la mer.
Devenir visible, le défi
Il semble donc que la mise en valeur des sites, et, surtout, la volonté des autorités locales de faire d’une ville un
lieu culturel font la différence. Toutes les villes qui se sont fait un nom chez les producteurs étrangers sont des villes qui bénéficient d’une grande visibilité. Une ville comme Safi est le meilleur exemple de ce déficit d’image à l’échelle
internationale. Pourtant, la capitale de la région Doukkala Abda n’a pas moins d’intérêt visuel
qu’Essaouira qui resta longtemps son parent pauvre. Seul problème, pour le savoir, il faut être natif de Safi ou connaître son histoire. Nour-Eddine Lakhmari, le réalisateur safiot, y avait ainsi tourné Le Regard, une coproduction maroco-norvégienne. Et cette année, Hamid
Zoughi rendait hommage à Kharboucha, la cheikha légendaire venue des
environs de Safi. En 2007, deux téléfilms (ici et ici) et un long métrage marocains ont été tournés à Safi et sa région. Cependant,
depuis Welles, la perle de l’Atlantique est désertée par les caméras des cinéastes étrangers.
Apparaître au cinéma, c'est exister...
Le miracle économique que
vivent certaines régions grâce au cinéma doit faire prendre conscience aux décideurs des villes oubliées de l’importance du développement de leur secteur culturel et artistique ainsi que du potentiel symbolique que représente le septième art. Le maître
Orson Welles avait compris quant à lui, dès 1950, que donner une image cinématographique au Maroc, alors encore sous domination française, était lui donner une existence politique. Souvenons-nous
aujourd’hui de la puissance de ce tribut et donnons encore plus de visibilité au Royaume et à toutes ses régions.