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Rencontre avec un franc-maçon de “base”

Publié le 23 février 2011 par Davidme

eq-comp.1298388462.jpg Faisons œuvre de journalisme ! Voilà ce qui a présidé à l’écriture de ce billet. Loin des marronniers des gazettes sur le supposé complot maçonnique, qui dirige le monde, les administrations, la justice, la politique et que sais-je encore, « Le journal d’un journaliste » a décidé de partir à la rencontre, d’un franc-maçon ordinaire. Ces francs-maçons ordinaires sont l’immense majorité et les magazines en insistant sur les errements de quelques gugusses entretiennent ainsi volontairement un antimaçonnisme réel.
Ce franc-maçon de base est celui qui se rend deux fois par mois dans son atelier pour réfléchir sur lui et, parfois aussi, sur la société. Il nous raconte en exclusivité et anonymement ce qu’est la Franc-Maçonnerie à ses yeux et pourquoi elle est très éloignée de l’ensemble des clichés que l’on peut lire dans la presse. Cette personne restée anonyme est une personne avec qui je converse souvent et qui s’est dévoilée à moi suite à différents articles ou tweets sur les unes niaises des hebdos sur la franc-maçonnerie. L’idée qu’elle m’a soumise m’a plu. La parole est donc à un franc-maçon de « base ». Loin des clichés. Rencontre avec celui que l’on appellera Joshua.

Comment et pourquoi êtes-vous devenu franc-maçon ?

Joshua : Comment ? C’est assez simple en fait. J’ai toujours baigné dans cet univers. Des membres de ma famille sont francs-maçons et ne s’en sont jamais cachés. J’ai donc appris à connaître de l’extérieur les valeurs de la maçonnerie. Pourquoi ensuite ? Là, c’est plus complexe. À un moment de ma vie où j’avais bien avancé dans ma vie professionnelle et personnelle, j’avais besoin de sortir des contingences « matérielles » pour me poser, réfléchir à mon parcours, et pour réfléchir aussi à différents problèmes de société. Finalement, après dix ans de maçonnerie, j’analyse cela comme un besoin de spiritualité laïque, sans dimension religieuse, à la fois personnel et collectif.

Quels sont les fondamentaux de la maçonnerie ? Une volonté d’influer sur la marche du monde, comme on le lit souvent dans les journaux ?

Joshua : La franc-maçonnerie se caractérise surtout par une recherche d’amélioration personnelle. C’est à dire que celui qui devient maçon et qui va dans sa loge deux fois par mois veut d’abord et avant tout se remettre en question. Ensuite, la valeur cardinale de la maçonnerie est l’écoute et la tolérance de celui ou de celle qui est différent. Dans cette démarche personnelle, il y a évidemment une démarche collective. Collective dans le sens où la loge est un lieu d’intelligence collective où les « frères et les sœurs » peuvent réfléchir (cela dépend des obédiences, NDLR) à l’amélioration de la société. Il n’y a donc pas de volonté concertée, pensée et définie d’influer sur la marche du monde. Par contre, les maçons sont le plus souvent concernés par ce qu’il se passe dans la Cité et par la ResPublica au sens large. Ce qui nous motive, nous maçons, est le progrès de l’Humanité.

Pourquoi garder le secret qui fait tant fantasmer ?

Joshua : Grande question. Nous ne sommes pas secrets, mais discrets. Nos obédiences sont des associations Loi 1901 déclarées à la préfecture. Loin du secret donc ! Discrétion parce que la Franc-Maçonnerie est une démarche personnelle privée. Cela fait fantasmer car la démarche intrigue et interpelle.

Mais certains maçons ont montré du favoritisme dans des affaires judiciaires, et d’autres ont parfois sombré dans les conflits d’intérêts. Preuves d’une volonté d’entraide et de soutien entre « frères » au détriment des règles ?

Joshua : Les maçons sont des hommes et comme tous les hommes, ils peuvent fauter, se tromper et agir de mauvaise façon. Mais cela est indépendant de leur qualité de franc-maçon. Ils ont fauté parce qu’ils sont des hommes. Point. Ensuite, maçonniquement, ces errements ont été durement sanctionnés et la plupart des obédiences ne sont pas touchées par cela. De même, l’immense majorité des « frères et des sœurs » vient en loge pour travailler, pour échanger, et pour, tant bien que mal, s’élever. Pas pour faire des affaires, se créer un réseau ou obtenir des passe-droits. Dire cela et faire croire cela est méconnaître complètement ce qu’est la maçonnerie ! C’est vouloir purement et simplement la salir !

Mais de quoi parle-t-on dans les loges ?

Joshua : Je ne vais pas vous dire ce qui se passe dans nos murs. Mais ce que je peux vous dire, c’est que les sujets vont de la symbolique des couleurs, à celle du chiffre 3 ou à celle de l’équerre en passant par les problématiques posées par l’euthanasie, par les difficultés de l’école publique pour arriver finalement à s’interroger sur le temps. Bref, les maçons échangent, évoluent et réfléchissent ensemble. Venir travailler tous les quinze jours n’est pas une sinécure. C’est une volonté personnelle car parfois nos réunions sont ennuyeuses et soporiphiques.

Donc les obédiences reçues par les différents présidents de la République, ou par des parlementaires, ne sont pas influentes…difficile à croire…

Joshua : Si. Il y a une influence. Mais les obédiences maçonniques ne complotent pas. Elles veulent porter certaines valeurs comme la laïcité, la fraternité, la liberté ou l’égalité. Elles se battent pour le progrès de l’Homme. Pour cela, elles font entendre leur voie auprès des pouvoirs publics. Comme n’importe quelle association, d’ailleurs.


Pourquoi avez-vous eu envie de parler ici et maintenant ?

Joshua : D’abord, parce que vos tweets et vos articles sur la vacuité des Unes sur les Franc-maçons m’ont parlé. Ensuite, parce que j’avais envie, suite aux dernières Unes sur le sujet, de faire, pour une fois, entendre, la voix de la majorité des maçons qui ne sont pas dans les conflits d’intérêts, ni dans l’affairisme, ni même dans la recherche d’accointances. Faire croire cela est honteux et blessant pour les frères et sœurs qui chaque mois se réunissent et réfléchissent pour progresser. Tout n’est pas rose en maçonnerie. Mais une chose est certaine, la masse silencieuse est à mille lieux des turpitudes de quelques hiérarques de certaines obédiences. On n’entend jamais cela et vos confrères ne sont pas preneurs de ce genre de témoignages, pas assez sensationnalistes sans doute…


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