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Plumes en cage

Publié le 04 décembre 2007 par Philostrate
   Les Jeux olympiques de Pékin ne sont pas encore ouverts que leurs organisateurs commencent à chinoiser. La liberté de la presse n'étant qu'une vue de l'esprit dans l'Empire du Milieu, ce sont les journalistes étrangers qui sont cette fois dans la ligne de mire des autorités.  Objectif  poursuivi : éviter que des individus "pouvant constituer un risque pour la sécurité" ou donner une mauvaise image du pays ne se glissent parmi les reporters accrédités pour couvrir les compétitions.

   Moyens mis en œuvre : constitution d'une base de données sur les journalistes étrangers et vérifications préalables, avec tests et enquêtes à la clé, sur les 10 000 dossiers d'accréditation attendus pour l'occasion. Que les passes-presse ne soient pas accordés à la légère tombe sous le sens en ces périodes de menace terroriste généralisée. Le problème en dictature, c'est que le métier même de plumitif suffit à rendre suspect celui qui l'exerce. Pour peu qu'il se mette en tête de critiquer ou d'exercer son libre arbitre, il peut même facilement revêtir le costume d'ennemi public N°1.

   Quelques conseils donc aux journalistes qui comptent se rendre à Pékin. Chers amis, je vous comprends. Vous êtes trop jeunes pour avoir couvert les belles retraites aux flambeaux des Jeux olympiques de Berlin en 1936, top des réjouissances sportives dictatoriales organisées jusqu'à présent. Vous ne pouvez décemment pas passer à côté d'un spectacle comme celui que promettent d'être ces Jeux à la chinoise, avec leurs cohortes d'enfants sur le pied de guerre comme aux plus belles heures des démocraties populaires du temps du Rideau de fer.

   Pour que votre dossier d'accréditation ne soit pas irrémédiablement rejeté, quelques précautions s'imposent. D'abord, faites-vous prendre en photo avec une paire d'œillères, afin de garantir à vos hôtes chinois que, si les compétitions sont réussies, vous ne chercherez surtout pas à mettre le nez dans les poubelles du régime communiste. Si vous voyez par inadvertance un opposant où l'un de vos confrères locaux tirés par les cheveux par un Garde rouge, ne relevez surtout pas, dites-vous que ça fait partie du show ! N'emmenez en aucun cas une photo de votre chat ou de votre chien dans votre portefeuille, cela pourrait passer pour une allusion sournoise aux habitudes alimentaires supposées des disciples de Fu Manchu. Enfin, bannissez définitivement les lettres T, I, B, E, T de votre prose, même dans le désordre, afin de ne pas gâcher sur un bête malentendu un si agréable séjour. La fête internationale du sport, même dans la plus grande dictature du monde, doit avant tout rester une fête. Sinon à quoi ça servirait que le CIO y se décarcasse ?

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