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Rose & Noir

Publié le 23 septembre 2009 par Vance @Great_Wenceslas

Rose & NoirUn film de Gérard Jugnot (2009) avec Gérard Jugnot & Bernard Le Coq

Résumé : 1577. Pic Saint Loup, le couturier le plus couru de Paris, achève son nouveau défilé de mode. C’est un triomphe et les admirateurs sont légion. Mais le roi Henri III le charge de partir pour l’Espagne où l’un de ses neveux doit se marier, et d’y créer une somptueuse robe pour la noce. Pic n’a pas le choix, il part avec son fidèle secrétaire (Castaing, un protestant rêvant de venger ses pairs massacrés à la Saint-Barthélémy), son nègre, Flocon (un Arabe teint en blond qui est le vrai créateur de ses collections) et ses suivants homosexuels. Ce qu’il ignore, c’est qu’il va se retrouver à Séville dans un univers totalement opposé aux folies parisiennes : son hôte est un Grand Inquisiteur et la présence de ces Français aux mœurs légères a largement de quoi l’irriter…

Au lendemain de ma dernière inspection (qui s’est fort bien déroulée, je vous rassure), une avant-première avait lieu. Invité gratuitement, donc, je ne pouvais faire autrement que m’y rendre, la fleur au fusil, ne sachant absolument pas de quoi il en retournait. A vrai dire, l’affiche ne m‘emballait guère : les fanfreluches colorées des uns s’opposaient à la rigidité morbide des autres. Des costumes qu’on aurait dit venir en droite ligne de malles oubliées lors du tournage de la Folie des Grandeurs indiquaient tout de même un scénario historique.

Et puis, il y avait Gérard Jugnot.

Non pas que j’en sois particulièrement fan. Néanmoins, depuis Pinot simple flic, le bonhomme a su se construire l’image d’un artiste intègre et gentil, promenant sa générosité évidente dans des productions pleines de bons sentiments, souvent naïves – mais pas niaises – et qui parlent à chacun de nous. Bien que ses interprétations ne soient pas toujours au diapason (il mine un peu Faubourg 36 par un jeu légèrement outré), il sait toucher et émouvoir sans recourir à trop de fards ou mimiques (ses prestations dans Monsieur Batignolle ou les Choristes sont remarquables de sobriété).

Il était là, hier soir, alerte et joyeux, accompagné d’une Saida Jawad craquante et d’un Assaad Bouab un peu discret, vantant (et vendant donc) son film comme le miroir d’une époque où, malgré l’ouverture et la tolérance prônées par l’Humanisme de la Renaissance, le racisme et la discrimination rongeaient encore une société indifférente envers les différences (sic). Film à message donc, bien que savamment mêlé au souffle de l’aventure et au burlesque des situations. Jugnot évoquait même à plusieurs reprises la Folie des grandeurs dont il avouait s’être inspiré.

Cela, d’ailleurs, saute aux yeux, tant dans la construction des intrigues, que dans les situations : Saint Loup faisant la révérence devant son roi renvoie automatiquement à l’inoubliable Don Salluste de De Funès. La future épouse est tout aussi maternée par une « vieille chouette » que ne l’était la reine d’Espagne. Les costumes, hauts en couleurs, aux superbes broderies, se vient également soutenus par une musique gaillarde mêlant timbres hispaniques et flonflons gaulois. Parfois, de bons mots fusent. On pourra d’ailleurs, si l’on y prend goût, guetter les réparties de Castaing, un lettré amoureux de la belle langue, joué par un très bon Le Coq (à la langue aussi vive que son esprit).

Malheureusement, l’ensemble souffre aussi de cette ascendance cinématographique. Même les décors déçoivent, là où le vent de l’épopée était promis : de Séville, on ne voit que quelques tours et une ruelle, de la France capétienne que la façade d’un château. On rit, certes, mais rarement, et parfois à regret : l’humour est parfois trop gras pour ces dentelles. Les rodomontades et pitreries de Jugnot, qui se donne visiblement du mal pour jouer un grand couturier gay sur le déclin se découvrant sur le tard une âme philosophe et compatissante, ne convainquent pas et les situations s’enchaînent avec un pénible sentiment de déjà-vu. Le personnage de Flocon, Arabe doué grimé en blond Normand ( !), rate totalement sa cible et demeure terriblement mal employé. Il permet toutefois de séduire Amalia qui, bien entendu, deviendra celle par qui tout sera possible.

Certes, la fin, plutôt osée quoique cruellement en porte-à-faux, fera réfléchir. Jugnot voulait tourner en Espagne et rendre une sorte d’hommage à ces grandes comédies de naguère, feux d’artifices de grands numéros comiques s’enchaînant dans de multiples péripéties en un  rythme haletant. Il ne réussit pas son coup, mais la tentative, il faut le reconnaître, était méritoire.

Ma note : 2,25/5


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