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Les racines indo-européennes de l'Europe

Par Amaury Piedfer
A l'heure où certains nient toute spécificité à la civilisation européenne, pour mieux livrer les Gaulois et leurs voisins au nihilisme mondialiste, d'autres s'acharnent à ne défendre que les prétendues "racines chrétiennes" de l'Europe, point de vue tout aussi faux que dangereux.
En effet, l'Europe fut d'abord, comme espace de civilisation, indo-européenne, dans sa quasi-totalité, puis chrétienne à partir du Vème siècle ap. J.-C. Parler de "racines chrétiennes" est fallacieux, parce que cela sous-entend que l'Europe est née du christianisme, qui en serait donc le terreau essentiel, le ciment primordial. Or, cette idée largement répandue est tout simplement erronée : si le christianisme a effectivement renforcé la conscience que les Européens avaient d'eux-mêmes -on parle alors de Chrétienté-, il n'est certainement pas la première civilisation qui fit l'unité de notre continent et de nos peuples.
Faut-il alors prétendre que l'Europe a des racines "païennes", comme le font certains ? Là encore, le terme est trompeur, approximatif et peu rigoureux : ce terme ne veut strictement rien dire au plan de la civilisation, c'est un fourre-tout, une définition en négatif de tout ce qui n'est pas chrétien, et qui recouvre donc, du point de vue chrétien, autant l'islam, que l'hindouisme, le bouddhisme, le chamanisme, l'animisme, que les anciennes religions romaine, grecque, celte, germanique, balte, slave, etc. de l'Europe. Il est préférable de parler de racines indo-européennes de l'Europe, expression qui pour le coup renvoie à la première grande civilisation qui a recouvert la presque totalité de notre continent, de l'Atlantique à l'Oural, lui offrant tout ensemble et peut-être pour la première fois [1] un système linguistique propre, une vision du monde et une mythologie propre, une technologie propre ; c'est l'acte de naissance de la civilisation européenne, dans le sens le plus complet du terme. Cette civilisation indo-européenne fut-elle moins aboutie que le christianisme ? Il semble bien qu'elle se soit diffusée à l'ensemble des peuples d'Europe, y compris ceux qui jusqu'à tout récemment passaient pour être restés en marge du phénomène indo-européen, tels les Basques. C'est ce que vient de démontrer un chercheur basque, docteur de l'université de Pau - Pays de l'Adour, comme le rappelle le site internet qui est consacré à ses travaux : "La langue basque est-elle à part parce qu'elle ne serait pas une langue indo-européenne ? Une théorie admise par tous jusqu'à ce qu'apparaissent les recherches d'Eñaut Etxamendy. Un érudit qui s'inscrit en faux contre cette hypothèse jamais contestée jusque-là. Invité à Ordiarp par les associations Bil Xokoa et Xiberoko Botza, le retraité, aujourd'hui âgé de 73 ans, a développé son analyse. Celle qui lui a valu le doctorat d'études basques à l'Université de Pau et des Pays de l'Adour, avec sa recherche intitulée « Euskara - erdarak. Basque et langues indo-européennes : essai de comparaison ».
Les spécificités de l'euskara Eñaut Etxamendy met donc en cause la théorie selon laquelle la langue basque serait une langue orpheline. « Aucune langue au monde ne l'est », estime-t-il. Quant à l'origine de cette hypothèse, l'ancien professeur et maraîcher l'attribue à des linguistes comme Humboldt. « Ils ont effleuré le basque et ils en ont conclu qu'il avait de grandes différences avec les langues indo européennes », analyse-t-il. Ces différences seraient basées sur le fait qu'en basque, il n'y a pas de genre. L'autre particularité du basque serait son ergatif. « Le sujet prend deux formes en euskara. Aita lanean ari da : mon père travaille. Aitak egin du : mon père l'a fait. Ces déclinaisons n'existent pas dans les autres langues », commente le linguiste. Le docteur ès-basque reconnaît toutefois que ces linguistes ignoraient ce que l'on sait aujourd'hui. De vieilles formes « Ces 30 ou 40 dernières années, les chercheurs ont vu que l'une des spécificités des langues les plus anciennes était l'ergatif. Pour le genre, il n'y en avait pas autre fois en latin non plus. Le genre est apparu très tard », affirme le chercheur. Eñaut Etxamendy explique que, grâce à ces dernières recherches les linguistes ont découvert que l'albanais était indo-européen de même que l'arménien. « Il en va de même pour l'euskara. Il fait partie intégrante de la vaste famille des langues dites indo-européennes, en puisant dans les plus vieilles formes aujourd'hui disparues », prétend le chercheur dans cette thèse." Nous vous recommandons, si vous voulez en savoir plus sur la langue basque et la linguistique indo-européenne, de vous reporter au site Etchamendy.
Ne manquait à cette Europe indo-européenne qu'une conscience d'elle-même, que le christianisme a sans doute contribué à lui donner, formant ainsi un développement tardif de la civilisation européenne. Utiliser le terme de "racines" pour désigner un développement tardif, c'est pour le moins peu pertinent.
Arthur,Omios.
[1] Il n'est pas exclut qu'il puisse avoir existé d'autres civilisations unitaires avant, mais nous n'en avons pas suffisemment de vestiges pour l'affirmer, contrairement au cas de la civilisation indo-européenne, pour laquelle les héritages linguistiques (le grec, le latin, le celtique, le germanique, le slavon, etc., et toutes les langues qui en dérivent), religieux et symboliques (la trifonctionnalité, le symbolisme solaire, le polythéisme, le caractère unitaire du kosmos, etc.), matériels et techniques (la roue, le char, la métallurgie du bronze, etc.), abondent. Sur ces différents aspects, voir la remarquable synthèse de Jean Haudry, ancien directeur de recherches à L'Ecole Pratique des Hautes Etudes (Paris).

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