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Rendez-vous poétique : Pablo Neruda

Publié le 06 septembre 2023 par Adtraviata

Le 23 septembre il y aura cinquante ans que Pablo Neruda est mort dans un hôpital de Santiago et dans des circonstances nébuleuses (je suis occupée à lire une enquête sur le sujet, dont je vous parlerai bientôt). On était en 1973, douze jours après le coup d’Etat de Pinochet.

Pour commémorer cet anniversaire, Marilyne et moi mettons le poète à l’honneur pour la reprise de ce rendez-vous poétique. J’ai choisi deux textes extraits d’une parution récente des Editions Seghers en édition bilingue.

Rendez-vous poétique : Pablo Neruda

Voici la présentation de l’éditeur :

En 2014, quarante ans après la disparition du Prix Nobel chilien, la fondation Neruda exhumait vingt et un poèmes inédits de ses archives. Salué dans le monde entier, cet événement littéraire de premier ordre consacrait Pablo Neruda comme un poète inépuisable par l’ampleur, la force et la postérité de son œuvre.

Écrits entre 1956 et 1973 sur des supports de fortune, contemporains de La Centaine d’amour et du Mémorial de l’île Noire, souvent griffonnés à l’encre verte, ces poèmes empruntent des motifs récurrents de l’œuvre de Neruda : l’amour pour les femmes, le voyage, le pays natal livré aux séismes et à l’incertitude politique, l’art poétique, les forces telluriques et enfin la nature, toujours féconde et luxuriante.

À la lecture de ces textes, chacun entendra résonner, par-delà le tombeau, la voix si puissante et familière de celui qui incarne à jamais une foi inébranlable en la fraternité humaine.

J’ai choisi le poème numéro 5 :

Dans le ciel je m’approche

de l’éclair rouge de ta chevelure.

Je suis de terre et de blé et à mon approche

ton feu se prépare

à l’intérieur de moi, il enflamme

les pierres et la farine.

C’est pourquoi il croît et monte

mon cœur, il se fait

pain pour que ta bouche le dévore,

et mon sang est le vin qui t’attend.

Toi et moi sommes la terre et ses fruits.

De pain, de feu, de sang et de vin

est le terrestre amour qui nous embrase.

Et le numéro 17 :

Je dis bonjour au ciel.

Plus de terre. Elle s’est détachée

hier et cette nuit du navire.

Derrière est resté le Chili

et seuls quelques oiseaux sauvages

continuent à voler levant

le nom obscur et froid de ma patrie.

Habitué aux adieux

je n’ai pas usé mes yeux : où

sont enfermés les larmes ?

Le sang monte des pieds

et parcourt les galeries

du corps y peignant son feu.

Mais où se cachent les pleurs ?

Quand ils viennent la douleur point. 

Mais moi je parlais d’autre chose.

Je me suis levé et sur le navire

il n’y avait que du ciel et du ciel,

un bleu ininterrompu

par un réseau de nuages tranquilles

et innocents comme l’oubli.

Le navire est nuage de la mer

et j’ai oublié quel est mon destin,

j’ai oublié la proue et la lune,

je ne sais pas où sont les vagues,

ni où m’emporte le navire.

Le jour n’a ni terre ni mer.

Les poèmes sont accompagnés d’un carnet de trente pages de fac-similés.

Pablo NERUDA, Tes pieds je les touche dans l’ombre, traduit de l’espagnol (Chili) par Jacques Ancet, Editions Seghers, 2022


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